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amena la fermeture des meilleures écoles, succéda une indifférence non moins funeste, qui empêcha d’en créer de nouvelles. Il fallut l’intervention active du pouvoir central pour arrêter cette marche en arrière. La loi communale de 1836 et ensuite, en 1842, la loi organique de l’enseignement primaire suscitèrent un mouvement de progrès qui ne s’est plus arrêté. La loi de 1842 n’a subi aucune modification depuis son origine, elle régit encore actuellement l’instruction du peuple en Belgique : il est donc nécessaire de la faire connaître.

Dans ses dispositions principales, cette loi rappelle la loi française de 1833. Elle décide d’abord que dans chaque commune il y aura au moins une école primaire établie dans un local convenable ; mais la commune n’est pas tenue nécessairement de rétablir à ses frais, quand il est suffisamment pourvu aux besoins de l’enseignement par les écoles privées. Tous les enfans indigens ont droit à recevoir l’instruction gratuitement. Le conseil communal nomme l’instituteur ; seulement il est tenu de le choisir parmi les candidats qui ont fréquenté avec fruit pendant deux années au moins les cours des écoles normales soumises à l’inspection. Les frais de l’instruction primaire sont à la charge des communes ; dans quelques cas prévus cependant, la province d’abord, ensuite l’état, accordent des subsides. La direction de l’école appartient à l’autorité locale, sauf pour ce qui concerne l’enseignement de la religion et, de la morale, dont la surveillance est attribuée aux ministres du culte. Un double système d’inspection est établi, une inspection laïque et une inspection ecclésiastique, exercées, l’une par des inspecteurs cantonaux et des inspecteurs provinciaux, l’autre par des inspecteurs diocésains, les premiers nommés par le gouvernement, les seconds par les évêques.

Telle est dans son ensemble la lot organique de 1842. Très vivement combattue d’abord par le parti libéral quand le parlement eut à la discuter, elle n’a cessé d’être attaquée depuis par les hommes les plus ardens de ce parti. On reproche surtout à cette loi d’avoir fait entrer le prêtre dans l’école à titre d’autorité. En Belgique, dit-on, l’état et l’église sont complètement séparés ; c’est donc aller contre l’esprit de la constitution que d’accorder des pouvoirs aux ministres des cultes, qui sont tout à fait indépendans de l’autorité laïque. On comprendrait ce système ailleurs, en France par exemple, où l’état intervient dans la nomination des évêques. En Belgique, où l’église n’a aucun lien avec l’état, on ne saurait l’admettre. D’ailleurs l’épiscopat désire naturellement voir les écoles des congréganistes remplacer les écoles communales : il n’aime pas l’enseignement laïque ; on a chaque jour la preuve que quand il peut lui