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a été en 1863 de 117 millions d’hectolitres et en 1864 de 111 : de pareilles différences dans les récoltes ne peuvent qu’entraîner de brusques secousses dans les prix. La récolte de 1863 a été de beaucoup la plus abondante qu’on ait jamais vue en France, et celle de 1864 l’a suivie de près. Il en est de même pour le vin. L’administration des contributions indirectes avait constaté que la production du vin avait diminué des trois quarts en 1854 par l’invasion de l’oïdium ; elle s’était relevée lentement depuis dix ans, mais sans arriver encore au même point qu’autrefois. En 1864, elle est revenue à l’état normal, et en 1865 elle l’a fort dépassé, la température de cette dernière année ayant été extrêmement favorable au vin, et beaucoup de nouvelles vignes plantées pendant la période des hauts prix ayant commencé à produire.

Qu’on mette en regard maintenant de cette production surabondante l’état de la population, qui ne s’accroît presque plus, et on comprendra aisément que l’équilibre entre, la production et la consommation soit pour le moment rompu. Dans d’autres temps, la population se serait accrue en quinze ans de 3 millions d’existences ; elle ne s’est accrue, de 1846 à 1861, que de 1,300,000, différence en moins : 1,700,000, qui manquent aujourd’hui parmi les consommateurs. Ce n’est pas un petit incident pour un peuple qu’un ralentissement si marqué dans le progrès de sa population ; on a beau chercher à l’oublier, il n’en porte pas moins ses fruits. L’agriculture en souffre doublement ; en même temps qu’elle y perd des consommateurs, elle se voit privée des bras dont elle a besoin, et les frais montent quand les produits baissent. L’exportation ne suffit pas pour rétablir complètement l’équilibre, pas plus que l’importation ne suffit en temps de disette ; dans l’un et l’autre cas, le mal est atténué, non détruit, car les prix d’une grande nation comme la nôtre se règlent par l’état du marché intérieur ; l’importation et l’exportation ne peuvent être que des appoints.

Quelques producteurs prétendent que ce n’est pas là ce qu’on leur avait promis. D’après eux, les défenseurs de la loi de 1861 avaient annoncé qu’à l’avenir il n’y aurait ni hausse ni baisse sur le blé. Nous n’avons pas à justifier dans toutes ses dispositions la loi de 1861, puisque nous avons combattu l’un de ses principaux articles, celui qui ne met sur le blé étranger qu’un droit fixe de 50 centimes par quintal métrique[1] ; mais à part ce point de détail le système de la loi de 1861 nous paraît bon, et l’expérience qu’on prétend avoir tourné contre lui s’est prononcée, selon nous, en sa faveur. On n’a jamais dit qu’il n’y aurait à l’avenir ni hausse ni

  1. Voyez la Revue du 15 avril 1861.