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Ammien Marcellin fait le récit complet de cette guerre sérieuse, au début de laquelle Firmus court s’emparer d’Icosium (Alger), réduire en cendres Cœsarea (Cherchel), la capitale même de la Mauritanie césarienne, et rallie, — comme autrefois Tacfarinas, — presque toutes les tribus maures et maziques sous son commandement. Firmus nous semble un vrai Kabyle, brave et fin, guerrier et diplomate. Dès que la renommée de Théodose arrive à son oreille, et qu’il le sait débarqué à Djidjelli avec un contingent de la Gaule, il cherche à gagner du temps et lui envoie une députation demandant l’oubli du passé ; Théodose réclame naturellement des otages avant de consentir à négocier, et se rapproche de la Montagne-de-Fer en gagnant Sétif. Une seconde députation vient encore arrêter le général sur sa route, mais sans amener d’otages ; Théodose mécontent poursuit son chemin sur la forteresse de Tubusuptus, dans l’Oued-Sahel, où il établit sa base d’opérations, au pied même du Djurdjura. Firmus alors se trouve fixé sur le point d’attaque qu’a choisi son ennemi, il laisse toute négociation, et la lutte commence.

Deux frères de Firmus, Dius et Mascizel, commandent les Tendenses et les Massissenses ; les territoires de ces deux tribus voisines de la vallée n’offrant pas des obstacles trop redoutables, c’est contre elles que Théodose s’avance : il y eut une mêlée furieuse, cessée deux fois, deux fois reprise ; les cohortes se croyaient triomphantes quand Mascizel, avec des recrues nouvelles, les vint forcer à une nouvelle lutte, à une seconde victoire chèrement payée. Il fallut la discipline des troupes romaines, la supériorité de leur armement, l’habileté de leur chef, pour l’emporter sur les frères de Firmus, et quand bientôt le grand rebelle se présenta lui-même sollicitant la paix, Théodose, « dans l’intérêt de l’état, » l’accueillit, l’embrassa et n’hésita pas à la lui accorder. Cette paix ne fut qu’une trêve que la méfiance mutuelle eut promptement rompue. Le général romain voulait, « imitant Fabius, éluder tout engagement sérieux avec un ennemi terrible ; » mais ses offres secrètes de transaction, écoutées de quelques peuplades, ne réussirent à ébranler les Quinquegentiens « ni par argent ni par menace, ni par espoir de pardon. » La guerre reprit, une guerre acharnée de plus de deux ans, semée de combats qui durèrent des jours entiers et de rigueurs cruelles que l’historien qualifie de salutaires au moment où il nous montre Théodose torturant, mutilant, brûlant vifs ses prisonniers. Brusquement assailli dès le début des hostilités, Théodose, « qui aspire à combattre et rougit de céder, » se voit contraint de faire