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preachers). Ils ne s’attachent à aucune chapelle, ils vont au contraire semant la parole de chaire en chaire : il est rare qu’ils se fassent entendre deux dimanches de suite dans le même endroit. On compte à peu près douze cents itinerant preachers dans la Grande-Bretagne. Les prêcheurs laïques ou locaux ne sont point au contraire rétribués par la confrérie. Ils exercent une profession, quelquefois même un état manuel, et on leur assigne la chapelle où ils doivent se faire entendre le dimanche. Ces orateurs ont une éloquence à eux ; leur parole énergique et inculte cherche à remuer dans les cœurs les cordes endormies du sentiment religieux. Toujours est-il que l’impression qu’ils laissent sur leur auditoire est considérable ; on s’en aperçoit bien aux sombres gémissemens qui sortent des poitrines émues. Les femmes elles-mêmes ne sont point exclues du ministère de la parole. Une jeune fille de dix-sept ans attirait récemment la foule dans quelques chapelles méthodistes. Outre le dimanche, qu’ils célèbrent dans la crainte et le tremblement, les wesleyens ont certaines fêtes particulières, par exemple les love-feasts (fêtes d’amour), qui ont lieu à certains intervalles, et un meeting connu sous le nom de watch night (veille de nuit), qui se tient le dernier jour de l’année pour saluer l’année nouvelle et inculquer dans les âmes l’idée de la brièveté du temps. Les parties de thé, les collations, auxquelles se réunissent quelquefois jusqu’à deux mille personnes, jouent aussi un grand rôle dans les affaires de la secte. Ce qui s’y recueille d’aumônes et de souscriptions est vraiment merveilleux. Lors du jubilé wesleyen qui eut lieu, il y a quelques années, en Angleterre, on ramassa une somme de 300,000 à 400,000 livres sterling. Quand on songe que cet argent sort en grande partie de la poche des pauvres, on ne peut méconnaître la force d’une doctrine qui inspire de pareils dévouemens.

Il serait superflu de poursuivre la division dans la division, et de rechercher ainsi toutes les sectes religieuses qui existent en Angleterre. On remarque pourtant parmi elles la nouvelle église (new church), greffée sur les ouvrages théologiques de Swedenborg. Ses doctrines ont été introduites dans la Grande-Bretagne par deux clergymen de la religion de l’état, Thomas Hartley et John Clowes, qui traduisit en anglais les Secrets du ciel (Arcana cœlestia). En 1783, onze ans après la mort du célèbre visionnaire suédois, une annonce insérée dans les journaux indiquait un lieu de rendez-vous pour les adeptes : cinq personnes s’y rendirent et formèrent une sorte de cénacle. En 1787, le nombre des croyans s’était élevé à dix-sept, et c’est vers ce temps que se constitua le nouveau culte. On voit comment naissent les sectes en Angleterre. Tout homme ou tout groupe d’individus ayant un système religieux et trouvant assez de