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opérations, et de plus, en se servant de capitaux qui ne lui coûtent rien ou lui coûtent peu de chose, elle peut les donner à bien meilleur compte que si elle se servait de son propre capital. Qu’est-ce en effet que le capital d’une banque à côté des opérations qu’elle est appelée à faire ? Voilà par exemple la Banque de France qui a un capital social de moins de 200 millions, et qui ouvre des crédits s’élevant à près d’un milliard, pouvant même s’élever plus haut, si la confiance du public le lui permet ! Le capital social, en supposant qu’il fût employé, ne serait qu’un appoint, et si par cet emploi il diminuait la confiance du public, s’il empêchait l’extension de la circulation fiduciaire et celle des dépôts, il enlèverait à la Banque plus de ressources qu’il ne lui en ajouterait. Les dépôts, voilà le véritable fonds qui doit servir aux opérations d’une banque, d’abord parce qu’il est susceptible de se développer indéfiniment, selon l’extension des affaires, et ensuite parce que, devant être presque toujours disponible, il ne doit être employé que dans les opérations d’une banque dont le caractère propre est de ne faire que des opérations à brève échéance et de ne jamais immobiliser ses capitaux. En présence de cette élasticité que peuvent prendre les opérations d’une banque au moyen des dépôts, ce qu’on a de mieux à faire du capital social, de celui des banques d’émission comme de celui des autres banques, c’est de l’employer à servir de garantie, de le placer en rentes ou en toute autre valeur publique. C’est ce qu’a fait la Banque de France, la Banque d’Angleterre, ce que font en général toutes les banques d’émission, et non-seulement les banques d’émission, mais toutes celles qui ont assez de crédit pour attirer les capitaux d’autrui. Qu’on interroge le portefeuille de toutes les banques particulières, celui des Joint-stock banks de Londres, de nos sociétés de crédit en France, on verra qu’elles ont généralement dans leur portefeuille une somme de valeurs publiques au moins égale à leur capital, et qui n’est là que comme garantie.

On dit : — Mais cette garantie n’existerait pas moins, si le capital était employé dans les opérations de la banque, s’il était représenté dans le portefeuille par des valeurs commerciales. — On ajoute même que, ces valeurs de portefeuille étant moins susceptibles de varier que les valeurs de bourse, la garantie serait encore meilleure et plus sûre. Je veux l’admettre, bien qu’il ne me soit pas démontré que le jour où la Banque de France aurait tout son capital employé dans ses opérations, et où le public ne verrait plus rien derrière le portefeuille, il aurait la même confiance en elle, et laisserait l’encaisse métallique descendre au quart de la circulation fiduciaire et au cinquième de toutes les exigibilités, en y comprenant les dépôts, comme nous l’avons vu l’année dernière. Je l’admets pourtant, et