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nasties que Rome avait eues avaient toutes mal fini, celle des Césars par Néron, celle de Vespasien par Domitien, de Marc-Aurèle par Commode, de Septime-Sévère par Caracalla. A Constantinople, les dynasties ne furent pas plus heureuses. L’empire romain à Rome et l’empire grec à Constantinople n’avaient pas ce qu’il faut pour avoir des dynasties durables. La stabilité des dynasties tient à l’unité des peuples. Or il n’y a pas de peuple et de société qui aient jamais eu moins d’unité nationale que l’empire de Rome ou de Constantinople. Quand on est le monde entier, on peut être un état, mais on n’est point un peuple. Le palais des césars à Rome et le palais des empereurs grecs sur le Bosphore ressemblent à un vaste panthéon où entrent tour à tour les dieux de toutes les nations et de toutes les races. Il y a des empereurs de toutes les provinces, de tous les pays qui forment l’empire, et il y en a aussi de toutes les sectes chrétiennes de l’Orient. Les Thraces sont remplacés par des Africains, les Africains par des Arméniens et des Phrygiens, ceux-ci par des Macédoniens, les Macédoniens par les Comnène issus de Rome. L’élection prend partout ses élus ; souvent aussi l’audace les lui impose. Byzance voit à peine une dynastie durer plus d’un siècle, et cette mutabilité n’est pas un malheur pour l’empire, car on peut remarquer que les résurrections de l’empire grec coïncident avec l’avènement des dynasties nouvelles. Le règne de Justinien est glorieux pour l’empire ; Justinien représente une dynastie nouvelle fondée par son oncle Justin Ier, qui est fils d’un laboureur. Héraclius relève la fortune de l’empire ; il est le chef d’une dynastie nouvelle. Il en est de même de Léon l’Isaurien et de Basile le Macédonien. Le corps du vieil empire reprend la vie aussitôt qu’il reçoit un nouveau sang. Il y a des états qui tombent par de trop fréquens changemens de dynasties ; l’empire grec se relève par ce qui ordinairement perd les autres états.

C’est à ces changemens de dynastie qu’il faut faire honneur de la résistance que firent la Sicile et l’Italie méridionale aux attaques des Sarrasins. Sous Théophile, le second empereur de la dynastie phrygienne (829-842), et sous Basile Ier, fondateur de la dynastie macédonienne (867-886), l’empire grec reprit un peu d’énergie et de grandeur. Il eut des hommes de cœur à son service : ainsi, sous Théophile, en Sicile, le patrice Alexis Muscegh, un jeune Arménien plein de valeur et de talent que l’empereur Théophile avait pris en grande faveur et qu’il fiança à sa fille Marie encore enfant. L’empereur fit coup sur coup de Muscegh un patrice, un proconsul, un maître des officiers du palais, un césar, il voulait même en faire son successeur ; mais à peine l’eut-il élevé si haut qu’il se mit à le soupçonner, et il le fit général de l’armée de Sicile pour l’éloigner de