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vallée de la Saltine; là, elle franchit le col au moyen d’un tunnel de 12 kilomètres en ligne courbe; puis elle suit la Diveria, et, empruntant pour se développer les versans de plusieurs vallées latérales, elle arrive avec des pentes modérées jusqu’à Domo d’Ossola. De Sion à Domo d’Ossola, il y a 119 kilomètres; il y faut ajouter 54 kilomètres pour atteindre Gozzano, où aurait lieu le raccordement avec les chemins du Piémont.

On désigne sous le nom de Lukmanier un col qui se trouve entre Coire, chef-lieu du canton des Grisons, et Biasca, qui est le point de jonction des deux vallées de la Lévantine et du Blegno. Une assez bonne route part aujourd’hui de Coire, atteint Reichenau, où se joignent les deux bras principaux du Rhin, et monte jusqu’à l’ancienne abbaye de Dissentis. De là, un sentier à pente assez douce remonte un des bras du Rhin et gagne l’hospice de Santa-Maria un peu au-dessous du sommet du col, à 1,917 mètres d’altitude; il descend ensuite par une pente plus rapide en contournant la montagne du Scopi et arrive à Olivone, où il se transforme en route carrossable, pour rejoindre à Biasca la route postale du Saint-Gothard. Le sentier du Lukmanier, vu à vol d’oiseau, offre l’aspect général d’un demi-cercle, et c’est en raison du grand détour qu’il fait que ses pentes sont généralement douces. Cette circonstance a contribué donner une sorte de faveur au passage du Lukmanier, surtout à l’époque où l’on espérait encore pouvoir franchir à ciel ouvert les cols élevés, et l’on a cherché avec obstination une ligne de chemin de fer qui pût se rapprocher du sentier tracé entre Dissentis et Olivone. C’est dans cet esprit qu’est conçu le projet de MM. Michel et Pestalozzi, qui vient d’être repris avec quelques variantes dans une publication récente, die Lukmanierbahn. La voie, tortueuse et tourmentée, monterait jusqu’aux abords de l’hospice de Santa-Maria et atteindrait presque le sommet du col, qu’elle traverserait, à 1,865 mètres de hauteur, au moyen d’un tunnel de 1,700 mètres; puis elle descendrait par des courbes bizarres jusque dans la vallée de Blegno. Ce tracé allongerait le chemin d’une cinquantaine de kilomètres, entraînerait, en dehors des tunnels proprement dits, la construction de 20 kilomètres de galeries voûtées et forcerait la locomotive à franchir un excédant de hauteur de 600 mètres. Nous nous sommes déjà prononcé sur les énormes inconvéniens que présente une pareille solution, et qui sont de nature à la faire rejeter entièrement. Aussi bien l’opinion générale des ingénieurs est-elle plus favorable à deux autres projets dans lesquels la ligne franchit le Lukmanier à une hauteur beaucoup moins considérable. MM. Klein et Gerwig mettent le tunnel à 1,270 mètres d’altitude, et il a dans ces conditions une longueur de 12k,65;