Page:Revue des Deux Mondes - 1865 - tome 60.djvu/229

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

elles sont colossales. Un Français qui a vécu à San-Francisco me disait que la cité californienne est de beaucoup la plus vaste, la plus riche et la plus luxueuse des États-Unis.

La querelle s’aigrit entre le Canada et l’Amérique. Ceux mêmes qui chez eux font des vœux pour les rebelles ne pardonnent pas à une terre anglaise de servir de refuge aux pirates du sud. Ceux-ci deviennent plus audacieux que jamais. Ils viennent de saisir en mer le Roanoke, un paquebot qui revenait de la Havane; ils ont failli l’autre jour tenter un coup hardi sur Buffalo, et n’en ont été détournés que par l’avis donné à temps aux magistrats de la ville par les autorités anglaises. Vous voyez que le Canada fait son devoir, et qu’il serait injuste d’exiger plus; mais c’est pour la haine des deux peuples une occasion de se déployer. Il paraît qu’à Montréal, où s’instruit le procès des brigands sudistes, l’opinion est toujours très vive en leur faveur folie non moins grande que celle des provocations américaines. Ce n’est ni pour l’un ni pour l’autre peuple le moment d’entamer des disputes d’où la guerre peut naître.

Il est vrai que l’Angleterre s’y prend mal pour les apaiser. Ne riez-vous pas de l’admonition paternelle que l’Anglais sir H. Houghton et ses trois cent mille compatriotes adressent, au nom de l’humanité, à leurs frères cadets d’Amérique pour les décider à cesser une guerre fratricide et à se donner le baiser de paix? Cette pièce est un chef-d’œuvre de sotte maladresse et de naïve infatuation. Comme ces airs de bon apôtre conviennent bien au peuple anglais! Quelle sollicitude, et combien doivent en être touchés les Américains, qui savent toute la sympathie qu’on a pour eux chez nos voisins, tous les efforts qu’a faits le cabinet de Londres pour mettre à la raison les corsaires audacieux qui viennent s’équiper dans les ports neutres de la Grande-Bretagne! Il est vrai que les principaux signataires de l’adresse internationale sont connus pour des partisans déclarés de la sécession; ils l’ont publiquement assistée jusqu’à ce jour de leur influence, de leur parole et de leur argent. Ils ne pouvaient d’ailleurs imaginer rien de mieux pour stimuler l’humeur guerrière de leurs bons cousins.

4 novembre.

Tout le monde sait l’histoire de Chicago. Ce n’était, il y a trente ans, qu’un hameau de huttes indiennes. Il y a dix ans, elle n’avait que 34,000 habitans; au dernier recensement de 1860, elle en comptait près de 110,000. Aujourd’hui enfin on évalue sa population à 175,000 âmes. Elle est la métropole de l’ouest, la grande étape de l’émigration sur le chemin de la prairie, le centre d’un réseau immense de chemins de fer et de canaux, l’entrepôt du com-