Page:Revue des Deux Mondes - 1865 - tome 59.djvu/959

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ne veut pas de calamités pour le pays ; on a pu surprendre son esprit par des mensonges, on n’a jamais surpris son grand cœur.

« Il semblait naturel d’espérer que mon retour à Yédo donnerait une plus forte unité aux membres du gouvernement, et que je serais soutenu et encouragé par eux contre des aspirations et des entraînemehs inintelligens. Au contraire mon retour a été le prétexte d’un grand mal, qui révèle aux hommes amis du trouble des faiblesses et des dangers.

« A l’occasion de certaines explications demandées par le mikado, explications mal comprises, plusieurs hauts officiers ont voulu sortir de leur rang, et, interprétant mal le cœur du mikado, ont dépassé ses intentions. Ils ont attaqué non-seulement ma prudence, qu’ils ont appelée les uns trahison, les autres lâcheté, mais ils ont voulu même s’attaquer à ma personne, montrant par là que ce n’était pas seulement l’esprit d’hostilité contre l’étranger qui les faisait agir, mais le zèle d’une ambition mal réglée…

« Ceux qui veulent ainsi précipiter les choses ne peuvent pas se vanter d’aimer le pays… Mais que le peuple se rassure, les murmures ne peuvent qu’aggraver les difficultés. C’est une erreur de vouloir attribuer tous les malaises à la cause étrangère ; c’est ressembler à un malade qui, souffrant un peu dans tous les membres, s’en prendrait à un grain de sable qui l’aurait blessé au pied.

« Ne croyez plus ceux qui vous disent que je ne suis plus de l’avis du mikado. Nous n’avons jamais eu qu’un sentiment, bien que souvent, différemment éclairés, nous ayons jugé différemment l’état des choses.

« Que les paysans retournent à leurs champs, les artisans à leurs travaux et les marchands à leur trafic. Le gorogio sera bientôt au complet. Que ceux qui croient renouveler les scènes tragiques qui ont marqué le commencement de mon gouvernement abandonnent tout espoir de succès. Lors même que je déclarerais devant tout l’empire que je suis contre les étrangers, les difficultés seraient-elles pour cela toutes résolues ? Si ceux qui se croient sages le pensent, ils se trompent : une telle affirmation ne ferait qu’agiter davantage les esprits sans faire tomber le sabre des mains des étrangers.

« Communiquez ceci à toutes les résidences de daïmios pour être envoyé immédiatement à leurs seigneurs. »


« Le 25° jour du 6e mois (le 29 juillet 1864). »


L’attitude prise ainsi par le taïkoun produisit un heureux effet. Les lonines et les perturbateurs furent chassés de Yédo, où l’on en exécuta un grand nombre. Des forces furent envoyées contre les bandes des agitateurs, et deux combats où les troupes du taïkoun montrèrent une grande bravoure purgèrent de la présence de ces ennemis intérieurs la province de Yamato. Les débris des bandes mises en déroute se réfugièrent dans la chaîne de montagnes qui court du sud au nord de cette province.

Un haut fonctionnaire japonais était venu, avec plus ou moins de