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Le même soir, l’avant-garde des libéraux, sortis en masse de Jalapa et Perote pour défendre Huatuseo menacé, avait déjà fait son apparition à Elotepec, village indien distant de la ville de 40 kilomètres. Huatuco était trop vaste pour être défendu par une petite troupe, grâce à ses jardins ouverts sur toutes les faces. Le seul moyen d’arrêter le mouvement de l’ennemi était d’aller l’attaquer avant que ses rangs fussent trop compactes. Dans la nuit du 28 juin, deux officiers de fortune renommés dans la contre-guérilla pour leur hardiesse et leur sang-froid, Sudrie et Perret, bravant les mauvais chemins et les difficultés des pentes, tentèrent, à la tête d’un détachement d’élite, un vigoureux coup de main sur les avant-postes ennemis qu’ils culbutèrent. La rencontre, qui eut lieu à l’arme blanche au ravin nommé barranca del Diabolo sous les rayons de la lune, fut sanglante. Cet heureux fait d’armes, qui coûta trente-cinq tués et quarante-six blessés aux libéraux, retarda leur projet d’assaut sur Huatusco. Le 29 juin, l’élection de l’alcade accusa clairement l’esprit d’hostilité de cette ville ; les électeurs furent peu empressés, et les candidats nommés refusèrent tous l’honneur dangereux de s’allier à la cause française. En présence de semblables dispositions et devant les forces qui grossissaient à Elotepec, on dut évacuer la place, et, malgré les prières d’une partie de la population désespérée, la contre-guérilla rentra dans Coscomatepec, où deux compagnies du 7e de ligne étaient venues appuyer la colonne. Malgré tous les motifs plausibles qui conseillaient l’abandon de Huatusco, cette opération ainsi terminée fut une faute. Huatusco était un point important dont on savait la population en hostilité ouverte avec les idées françaises. Il valait mieux ne pas y entrer, si on ne devait pas s’y maintenir. Cette manière d’opérer, trop souvent répétée dans la guerre du Mexique en 1863 et 1864, n’a servi qu’à prolonger la résistance de plusieurs centres importans.

A peine l’évacuation de Huatusco était-elle accomplie, que les libéraux vinrent l’occuper avec deux pièces d’artillerie, et s’y livrèrent à toute sorte d’excès. La barranca qui traverse Coscomatepec fut solidement fortifiée par six cents soldats réguliers, et le quartier-général du chef Gamacho s’établit au rancho de Tlaltingo, qui domine la barranca et en commande la sortie. La contre-guérilla française envoya en hâte un détachement chercher des renforts à la Soledad, et, ainsi affaiblie, s’installa, faisant face à l’ennemi, à Coscomatepec, où elle éleva des ouvrages de défense. Les quatre rues débouchant aux angles de la place furent coupées et barricadées. L’église de Coscomatepec, où l’on accumula les munitions, l’eau et les vivres pour dix jours de résistance, devint un formidable