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l’alcade, chef politique et militaire selon l’habitude des temps de guerre au Mexique. Le pillage, quels qu’en fussent le prétexte et la forme, fut sévèrement interdit. Sous la conduite d’officiers spécialement désignés, les perquisitions commencèrent et amenèrent la saisie chez les principaux habitans de plus de 400 kilogrammes de poudre, de balles et de plomb en énorme quantité, de capsules de guerre et de moules faits pour fondre seize balles d’un coup. Les munitions inutiles furent jetées à la rivière ; les autres rendirent grand service.

ta ville de Tlaliscoya est assez vaste. Elle forme un grand demi-cercle dont la base repose sur la rivière ; elle est entourée de bois presque impénétrables. Lors des grandes crues, les eaux jaunâtres du, torrent viennent battre les pignons des maisons, construites en pierre volcanique, qui bordent la rive. L’église, de belle et ancienne construction, a été respectée par les guerres civiles ; de vieilles fresques à l’intérieur rappellent les peintures murales du midi de l’Espagne. Tlaliscoya était gardée avant l’arrivée des Français par une haie de cabanes en bambou qui servaient de postes aux guérillas. De ces postes, les habitans, pour peu qu’ils fussent parcimonieux envers les bandits, étaient couchés en joue, et payaient cher la protection d’amis toujours armés qui, au moindre danger, disparaissaient dans les forêts, dont seuls ils connaissaient les sentiers sinueux.

A l’extrémité ouest de Tlaliscoya s’élève une riche fabrique de coton, fondée par une compagnie américaine ; les murailles, hautes de 6 mètres sur un développement de 80 en longueur, sont à l’abri de, toutes les attaques, grâce à une épaisseur qui égale celle des couvens de construction espagnole dont le siège de Puebla devait offrir quelques échantillons dignes de la colère de nos boulets rayés. La fabrique de coton ne compte que deux portes, dont l’une s’ouvre sur la ville et l’autre sur le rio. Dès que la troupe des contre-guérillas eut été toute réunie, elle fut massée dans ce vaste bâtiment. La journée s’y passa fort calme. Les magasins contenaient quatre cents barils de farine, des quantités considérables de sucre et de café, et plusieurs milliers de balles de coton, sans compter celles dont l’ennemi s’était servi pour construire ses barricades. Ces richesses accumulées mirent un peu en éveil l’appétit des soldats, forcés de respecter une consigne sévère : pour des estomacs affamés, la tentation était forte ; mais la surveillance des chefs calma toutes les convoitées. Quant à la maison de Billegas, devenue le quartier-général, sur la parole donnée par le maître lui-même qu’elle ne renfermait ni armes ni munitions, on s’était dispensé par politesse d’y faire aucune perquisition. Le hasard fit