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citent et discutent leurs autorités, et leurs récits attestent une recherche d’exactitude peu commune dans le reste de l’Orient. On peut dire qu’aucun fondateur de religion n’est plus connu. Aussi presque en même temps, M. Weil en Allemagne et parmi nous M. Caussin de Perceval ont-ils tiré de ces monumens originaux, les éléments d’une véritable histoire qui suffirait pour jeter la plus vive lumière sur les origines du mahométisme. Le livre français, le seul qui nous soit connu, est un ouvrage excellent où la sûreté, du jugement le dispute à celle de l’érudition[1]. On doit à M. Reinaud un article biographique savamment composé[2], et ayant lui M. Renan, rassemblant dans une vue générale les faits ainsi habilement recueillis, et mis en plein jour, avait pu, dans un de ses premiers et de ses plus remarquables essais[3] y commencer par un examen des caractères de l’islamisme cette suite de considérations sur l’histoire des religions où se plait un talent dont l’éclat égale la témérité. Depuis lors, M. William Muir et le docteur Sprenger ont fait de nouvelles recherches, découvert de nouvelles sources, publié de nouveaux ouvrages, et l’on peut dire que la biographie de Mahomet est complète. C’est en présence de cette richesse d’informations, c’est à la suite de tant d’érudits et d’historiens, que M. Barthélémy Sainte Hilaire a cru le moment venu de résumer sous la forme d’un jugement philosophique tout ce qu’on peut savoir et tout ce qu’on doit penser de Mahomet et de son œuvre, et ce dessein, il l’a exécuté avec l’étude consciencieuse, la fermeté d’esprit, l’habileté d’exposition, qui distinguent ses écrits. Aucun ne porte davantage la vive empreinte des qualités éminentes qui recommandent son nom et justifient son autorité.

Nous doutons que Mahomet puisse être mieux apprécié, nous sommes assuré qu’il ne l’a jamais été aussi favorablement., Je veux, dit l’auteur, m’arrêter au caractère de ce grand homme et l’étudier suffisamment pour bien comprendre, par ce qu’il a été réellement, l’influence extraordinaire qu’il a exercée sur ses contemporains et sur la postérité. Je voudrais prouver, et je crois n’y avoir pas trop de peine, que Mahomet a été le plus intelligent, le plus religieux, le plus clément des Arabes de son temps, et qu’il n’a dû son empire qu’à sa supériorité ; je voudrais prouver que la religion nouvelle prêchée par lui a été un immense bienfait pour les races qui l’ont adoptée, et que cette religion, tout inférieure qu’elle est au christianisme, mérite beaucoup plus d’estimes qu’on ne lui en accorde généralement. » Ces paroles, si favorables à Mahomet, sont

  1. Essai sur l’histoire des Arabes, 3 vol. Paris 1847.
  2. Notice sur Mahomet, Paris 1860.
  3. Voyez la Revue du 15 décembre 1851.