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remonte de la cavalerie. Bien que ces conclusions n’aient représenté que l’opinion de la minorité y elles ont néanmoins été en grande partie adoptées par le gouvernement, qui, dans cette circonstance comme en beaucoup d’autres, s’est montré disposer à laisser une plus grande latitude à l’initiative individuelle.

Bien des personnes font un reproche au pur-sang d’avoir détruit les anciennes et belles races françaises, comme celles du Limousin, de la Navarre, etc. Voyons ce qui en est, et d’abord demandons-nous ce que sont ces races tant vantées. Il est incontestable qu’à l’époque où les communications étaient plus difficiles, où les provinces, n’ayant entre elles que des rapports fortuits, étaient obligées de produire les objets nécessaires à la consommation locale, chacune d’elles avait sa race de chevaux particulière, apte aux services qu’on exigeait d’eux ; mais, lorsque le marché s’est agrandi, les éleveurs ont cherché à satisfaire non plus seulement les besoins locaux mais les besoins généraux du pays, et à produire des chevaux aptes à divers usages. Nous avons vu ainsi une même province, la Normandie par exemple, produire successivement, suivant la demande, des chevaux de roulage, des chevaux de poste et des chevaux d’omnibus. Les autres provinces ont agi de même, puisque les chevaux qu’on vend aujourd’hui sous le nom de percherons sont originaires de Normandie, du Berri ou des Ardennes, et ont été élevés dans les plaines du Perche. Ainsi la production s’est modifiée en raison des besoins de la consommation, et c’est la vraie cause de la disparition des races indigènes. Il y a aujourd’hui si peu d’intérêt à les conserver que les hippiâtres n’en tiennent plus aucun compte, et qu’ils distinguent les chevaux, non plus suivant les pays de provenance, mais suivant les services auxquels ils sont destinés. Ils en font actuellement quatre divisions principales — les chevaux propres au roulage et à l’agriculture, — les chevaux de diligence, — les chevaux d’attelage, — les chevaux de selle. Cette division admise il est facile de comprendre que le sang anglais, donnant de la vitesse et de l’ardeur, pourra avec avantage être infusé aux races indigènes des deux dernières catégories pour leur procurer les qualités qui leur manquent. On a produit ainsi des anglo-normands qui sont d’excellens chevaux d’attelage et des demi-sang qui sont de très bons chevaux de monture. En Angleterre même, on fait des carrossiers en accouplant la jument du Norfolk avec l’étalon pur sang. On obtient par là un cheval très puissant et ayant de belles formes. Quant aux chevaux de roulage et à ceux de diligence, il est au moins douteux que l’introduction du sang anglais puisse améliorer les races que nous possédons. Nos chevaux boulonnais sont connus du monde entier et exportés même en Angleterre ; ils sont ardens et durs.