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bles, vous pouvez crier ! Votre temps est fini ; vous êtes à bout. Agonisez tout votre saoul, si cela vous soulage, mais la défaite de votre parti abominable et de votre plus qu’abominable politique est certaine ! » Les républicains répondent par un flot d’injures ; personne d’ailleurs ne s’en offense. N’est-il pas curieux que là où la presse est si violente, on ne la trouve jamais trop libre, et que là au contraire où elle reste inoffensive, on la traite comme un fou furieux ou comme un chien enragé ?

On parlait, il y a quelque temps, d’une convention modérée qui devait siéger à Buffalo et rassembler les hommes prudens de tous les partis : elle n’a pas eu lieu. Il faut choisir à présent entre la politique unioniste et la politique de sécession, ou, pour parler le jargon du pays, entre la plate-forme de Baltimore et la plate-forme de Chicago. « C’est le premier devoir de tout bon citoyen, disait en juin 1864 la convention républicaine assemblée à Baltimore, de maintenir l’intégrité de l’Union, l’autorité de la constitution et des lois des États-Unis. Mettant de côté toute dissidence d’opinions politiques, nous nous engageons à faire tout ce qui sera en notre pouvoir pour aider le gouvernement à éteindre par la force des armes la rébellion soulevée contre lui. » A quoi l’assemblée de Chicago vient de répondre : « Après quatre années employées sans succès à rétablir l’Union par l’expédient de la guerre, la justice, l’humanité, la liberté et l’intérêt public exigent la cessation immédiate des hostilités en vue d’une convention ultérieure des états ou de toute autre démarche pacifique propre à rétablir au plus tôt une paix fondée sur l’union fédérale. »

Voilà les deux drapeaux et les deux programmes en présence. Ils sont assez explicites pour se passer de commentaires. L’un veut, l’Union sans compromis, la nationalité tout entière ; l’autre veut la paix à tout prix, la retraite des armées, l’indépendance immédiate du sud, avec l’espoir d’un arrangement ultérieur d’où naîtrait une union nouvelle, c’est-à-dire une humble prière faite aux rebelles de vouloir bien rentrer en maîtres dans la famille américaine. Reste à savoir à qui le peuple donnera raison.

3 septembre. Sur le Mississipi.

Me voici encore une fois en route. Je descends le Mississipi jusqu’à Dubuque, ville florissante de l’Iowa, et s’il y a un chemin de fer qui conduise de Dubuque à Iowa-City et à Council-Bluff, sur le Missouri, je ne descendrai pas plus loin ; sinon je me rembarque jusqu’à Davenport, d’où je gagne le Missouri en passant par la cité nouvelle de Fort-des-Moynes, capitale de l’état d’Iowa. Peut-être même suivrai-je le fleuve jusqu’à Hannibal, où je prendrai le che-