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objection. Eh bien ! envisagée de la sorte, elle, a si peu de consistance qu’il n’hésite pas à déclarer, après le plus mûr examen, que, sous ce rapport, le régime de la cellule peut, en ce moment et sans l’ombre de désavantage, soutenir la comparaison avec les autres systèmes. Que serait-ce donc lorsque ce régime, assis enfin sur ses véritables bases, aurait été successivement doté des diverses améliorations qu’il comporte ? N’est-ce pas ici le lieu de faire remarquer que depuis un demi-siècle les anciens modes de répression ont reçu des modifications de toute nature pour lesquelles rien n’a été épargné, tandis que le système cellulaire, ballotté entre des essais incomplets tour à tour repris et abandonnés, n’a jamais été l’objet d’une expérience sérieuse ? Et de ceci il y a plusieurs raisons, très justement relevées par M. d’Alfaro. Il importe d’en dire quelques mots.

La première, c’est qu’à l’apparition de ce système les esprits, soit ignorance, soit surprise profonde, n’en envisagèrent le trait principal, l’isolement, qu’avec une sorte de terreur. Aussi, sur cette première impression et sans autre examen, se hâtèrent-ils de le rejeter ; puis bientôt on se prit à croire que l’on pourrait suffire à tout, moyennant les combinaisons mixtes ou intermédiaires dont nous avons parlé tout à l’heure : il fallait donc aller au bout de cette autre déception. Peut-être aussi alors, comme encore aujourd’hui, aurait-on difficilement trouvé dans le commun des âmes ; et des caractères une suffisante énergie pour envisager, humainement sans doute, mais froidement et sans sourciller, la nature même du devoir à remplir. Grande et rare qualité en effet que celle-ci, plus rare peut-être de jour en jour. — Comment se flatter d’ailleurs que de prime abord, et à l’origine précisément de l’une des questions les plus ardues de l’ordre social, on aurait l’heureuse fortune de rencontrer, parmi ceux qui administrent ou gouvernent, un de Ces esprits à la fois compréhensifs, lumineux et méthodiques qui, après avoir résolument admis le principe même du système et en avoir saisi l’ensemble et les traits principaux, saurait et voudrait entrer dans l’examen détaillé des moyens d’exécution ? Cela ne se voit guère, et dans tous les cas, ici du moins, ne s’est pas encore vu.

Peut-on s’étonner maintenant que le système cellulaire, pressé entre tant d’obstacles et de difficultés, n’ait pas réussi à frayer sa voie ? et ne doit-on pas admirer au contraire comment il a pu encore, et malgré tout, conserver tant de puissance et de vitalité ? C’est que sans doute il a eu pour lui le temps et l’expérience ; c’est que de plus, sous l’impulsion directe et impérieuse de l’intérêt social, qui domine ici tous les systèmes, les âmes se sont retrempées, les esprits se sont raffermis, et que, de proche en proche, le vrai même des choses, dégagé enfin des idées préconçues qui trop longtemps l’avaient obscurci, à fini par se montrer sous un jouir plus vif. Peut-être aussi convient-il de dire que ce n’est pas absolument en vain que les amis de la réforme pénitentiaire sont restés inébranlables dans leur foi, et qu’ils n’ont pas cessé un seul jour de multiplier leurs efforts. Il est bien rare en effet qu’un zèle aussi pur et aussi persévérant ne