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morphoses auxquelles ceux-ci avaient recours. Les mycodermes, ces pellicules lisses ou ridées, vulgairement appelées fleurs du vin, fleurs de la bière, fleurs du vinaigre, que l’on voit apparaître à la surface de toutes les liqueurs fermentées, sont des êtres organisés qui portent sur les matières organiques, telles que les sucres, les acides organiques, les alcools, les matières albuminoïdes, l’action comburante de l’oxygène. Les mucédinées, et sans doute aussi de petits infusoires, se trouvent ainsi être non pas la cause directe, mais la cause accidentelle de la fermentation. Telle est leur action que M. Pasteur a reconnu que l’on pouvait, par le développement d’une seule mucédinée, transformer en eau et en acide carbonique des quantités relativement considérables de sucre sans qu’il restât dans la ligueur la plus faible proportion de cette substance. Le même savant à constaté que toutes les fermentations proprement dites, visqueuse, lactique, butyrique, la fermentation de l’acide tartrique, celle de l’acide malique, étaient dues à la présence d’êtres organisés. Ce ne sont pas les matières albuminoïdes exposées au simple contact de l’air, de l’oxygène, qui constituent les fermens : ces matières n’en sont que l’aliment. C’est parce que l’air est tout rempli de corpuscules organisés, microscopiques, qu’il détermine par le simple contact la fermentation. Partout où l’atmosphère a été purgée de ces petits corps qu’elle charrie incessamment, qu’elle dépose à la surface des objets, la décomposition acide ou putride ne se produit plus. Ainsi, si les êtres microscopiques disparaissaient de notre globe, la surface de la terre serait encombrée de matières organiques mortes, de débris d’animaux et de végétaux. Ce sont les êtres microscopiques principalement, écrit M. Pasteur, qui donnent à l’oxygène ses propriétés comburantes : sans eux, la vie deviendrait impossible, parce que l’œuvre de la mort serait incomplète.

Ces poussières animées ou végétantes dont l’atmosphère inférieure est comme saturée, surtout dans nos villes, ces cellules organisées qui transportent l’oxygène de l’air sur toutes les matières organiques pour les brûler plus ou moins complètement, conservent leur fécondité jusqu’à la température de 130 degrés, c’est-à-dire jusqu’à cette même température au-delà de laquelle les spores ou germes reproducteurs des plantes cryptogames, appelés par le vulgaire moisissures, perdent leur faculté de reproduction. Ainsi nulle part nous ne pouvons saisir la vie apparaissant au sein d’une matière brute ou minérale, d’une matière même d’origine organique d’où elle s’est retirée. La condition indispensable de la transmission de la vie par un être déjà vivant où végétant au germe qui en doit produire un nouveau se retrouve à tous les degrés de l’organisation. Certaines expériences cependant ont pu tout d’abord faire