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tement. Une circulaire du ministre des affaires étrangères annonçait le 12 février la ferme résolution de continuer énergiquement la lutte, et en même temps le gouvernement de Copenhague adressait aux signataires non germaniques du traité de Londres la demande formelle d’une assistance. Dans la note que l’ambassadeur danois remettait à ce sujet le 11 février au foreign office, M. Torben Bille rappelait toutes les concessions faites jusqu’ici par son gouvernement dans l’intérêt de la paix et « sur les conseils pressons du cabinet de Londres, » ainsi que les déclarations diverses du ministère anglais, qui ne laissaient pas de doute sur son devoir. « Dernièrement encore, ainsi finissait la note, le cabinet de Londres a fait entendre à Francfort que, dans le cas d’une attaque du Slesvig, le Danemark ne serait point laissé seul dans la lutte ; mon gouvernement a dû y voir l’expression d’une détermination à laquelle le gouvernement britannique donnera suite avec toute l’énergie qui caractérise la nation anglaise !… » Outre le traité de Londres, —et surtout par égard pour le cabinet des Tuileries, qui avait décidément pris en aversion « l’œuvre impuissante » de 1852, — le gouvernement de Copenhague, dans sa demande d’assistance, invoquait encore un ancien traité de 1720, par lequel l’Angleterre, la France et la Russie avaient garanti « à sa majesté le roi de Danemark, ses héritiers et successeurs, la possession paisible du Slesvig, » en promettant de « les y maintenir contra quoscunque qui voudraient les y troubler soit directement, soit indirectement. »

Le cabinet de Saint-James fut d’abord assez curieux de savoir comment la France se tirerait de cette réminiscence d’avant le déluge, — de soixante-dix ans avant la révolution ! Mais on n’avait pas moins d’érudition à Paris qu’à Dresde, et M. Drouyn de Lhuys « étudiait » au besoin telle question pour le moins aussi « consciencieusement » que le roi Jean de Saxe. Le ministre des affaires étrangères de France expliqua donc clairement à lord Cowley que la « garantie » qu’on invoquait se rapportait seulement à certaines parties « ducales » du Slesvig, nullement à ses parties « royales, » et il put même montrer une petite carte, faite proprement et à point, qui représentait les divisions du Slesvig en parties ducales et royales très enchevêtrées, et telles qu’elles étaient en cette mémorable année 1720. « Si la carte est exacte, écrit l’ambassadeur britannique le 13 février, et si la garantie de la France s’étend en effet seulement à ce qui fut alors des parties ducales, on ne saurait nier qu’il serait extrêmement difficile d’exécuter maintenant une telle garantie… » Une fois engagé dans ces fouilles historiques, M. Drouyn de Lhuys fit même une véritable trouvaille. « Son excellence me dit tout dernièrement, écrit lord Cowley en date du 23 février, qu’en parcourant de vieilles paperasses (old papers) en rap-