rique au fond, la dépêche française était rédigée en termes mesurés et presque bienveillans pour le prince Kong, qu’elle s’appliquait à laisser en dehors des actes odieux dont elle demandait la réparation. — Tout autre était la dépêche de lord Elgin. L’ambassadeur anglais, signifia ses conditions dans un langage dur, hautain, impérieux. Il exigea 2,250,000 fr. d’indemnité pour les victimes de Tong-chaou (les Anglais comptaient plus de prisonniers et de victimes que les Français) ; il annonça que le palais d’été serait détruit et rasé, condition pour laquelle il disait n’avoir pas à attendre l’adhésion du prince, car les ordres étaient déjà donnés. Il déclara que, si tout n’était pas terminé le 23, l’armée anglaise s’emparerait du palais impérial à Pékin et recommencerait la guerre. Pas un mot d’égards ni de ménagemens pour le prince Kong. C’était une dépêche à tout rompre… Et le lendemain, 18 octobre, le palais d’été s’écroulait dans les flammes. Les Anglais seuls avaient allumé l’incendie.
On peut juger de l’anxiété qu’éprouva l’ambassadeur français en attendant la réponse du prince Kong. Cette réponse viendrait elle ? Donnerait-elle satisfaction ? L’attitude et le langage de lord Elgin, la destruction du palais d’été, la menace dirigée contre le palais impérial de Pékin, tout cela n’aurait-il pas à jamais compromis les affaires au moment même où la paix était indispensable et paraissait si proche ? Ces doutes étaient assurément permis. Enfin le 20 octobre arrivèrent les dépêches du prince, datées du 19. Voici ce qu’il écrivait au baron Gros :
« J’ai reçu, le 17 de ce mois, la dépêche que votre excellence m’a fait l’honneur de m’écrire, et j’en ai parfaitement compris le contenu. Je trouve juste que l’on donne aux familles de ceux de vos compatriotes qui ont été mal traités 200,000 taëls (150,000 francs), et je vous les remettrai moi-même avec exactitude. Les autorités qui ont fait subir de mauvais traitemens à vos nationaux seront punies conformément aux lois, et je viens de recevoir un décret impérial qui enlève à Sène-ouang (San-ko-lin-sin) sa dignité de prince, et prive de ses fonctions le ministre Choui.
« Je vais faire préparer dans Pékin un hôtel pour votre excellence.
« Quant aux églises catholiques élevées dans chaque province dès le règne de l’empereur Khang-ni, à leurs cimetières et à leurs dépendances, il est juste d’en faire une recherche exacte et de vous les rendre. C’est dans les conférences que tiendront ensemble les délégués des deux empires que ces questions pourront être définitivement arrêtées. »
Dans sa réponse à lord Elgin, le prince Kong acceptait les conditions anglaises. Il ne parlait point de la destruction du palais d’été, les injonctions hautaines de l’ambassadeur lui ayant à l’avance fermé la bouche et le fait étant accompli. Il ne parlait pas non plus