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tés ; ils estimaient donc qu’à moins d’incidens ultérieurs qui les délieraient de leurs engagemens, ils devaient s’abstenir de toute mesure de rigueur dans l’intérieur de la ville. Forcé de battre en retraite devant la contradiction formelle des généraux, l’ambassadeur anglais imagina deux nouveaux moyens : il voulait exiger des Chinois l’érectionài Tien-sin d’un monument expiatoire sur lequel seraient inscrites, la date et les circonstances de l’attentat, en second lieu faire détruire, et raser jusqu’au sol le palais d’été de l’empereur, où les troupes françaises avaient bivouaqué du 7 au 9 octobre. Le baron Gros combattit très vivement cette double proposition. Comment pouvait-on espérer que le gouvernement chinois, si courbé qu’il fût par la défaite, subirait la honte du monument expiatoire ? Quant à la destruction du palais d’été, c’était aux yeux de l’ambassadeur français, dont l’opinion était énergiquement appuyée par le général Montauban, un acte brutal de vandalisme, une œuvre de vengeance indigne d’une nation civilisée, et de plus une faute des plus graves, car on risquait ainsi d’exaspérer le prince Kong, de le déterminer à prendre la fuite, et de briser à l’heure suprême l’unique instrument de la paix. Lord Elgin renonça, non sans regret, au monument expiatoire ; mais les instances de son collègue pour lui faire abandonner ses projets contre le palais d’été le trouvèrent inflexible. Pour la première fois depuis le commencement de la campagne, les deux ambassadeurs étaient en dissidence complète, et cela au moment décisif et à l’occasion d’un acte qui pouvait avoir des conséquences incalculables. Pour la première fois ils allaient, après avoir toujours agi et écrit de concert, transmettre au gouvernement chinois, que le prince Kong représentait alors à lui seul, des conditions différentes.

Il fallait en effet répondre à la lettre, du 12 octobre, par laquelle le prince affectait de considérer les difficultés comme entièrement terminées, et manifestait tant d’empressement pour signer la convention. Les réponses des deux ambassadeurs lui furent adressées le 17 à la suite des discussions dont nous venons de rendre compte. Le baron Gros, après avoir rappelé les manœuvres déloyales du cabinet de Pékin dans le cours des négociations et flétri en termes indignés l’attentat du 18 septembre, énonça les deux clauses additionnelles à insérer dans le projet de convention : 1° pour le paiement immédiat d’une indemnité de 1,500,000 francs, 2° pour la restitution des anciennes églises et de leurs dépendances à Pékin. L’ensemble des actes, y compris l’échange des ratifications du traité de Tien-tsin, devait être réalisé au plus tard le 23 octobre ; sinon, les hostilités seraient reprises sur terre et sur mer, et s’étendraient à toutes les provinces et a toutes les côtes de l’empire. Très catégo-