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février 1861, ce diplôme eut à subir une sorte de jugement préliminaire de la part des populations de la monarchie. Chose assez singulière, il rencontra moins d’opposition chez les races allemandes et slaves que chez les Hongrois. Ceux-ci l’accueillirent avec des manifestations de la plus violente, de la plus méprisante hostilité. Le contre-coup se fit sentir à Vienne. La réponse au rejet de l’october-diplom de la part des Hongrois fut la constitution de février 1861 de la part des Autrichiens. Peut-être l’Autriche se pressait-elle trop, au printemps de 1861, de décréter ce qui pour la Hongrie était inexécutable. De toute façon, l’hostilité des Magyars contre le diplôme d’octobre se trouva punie par la promulgation d’une loi organique qui leur ordonnait de se faire représenter par quatre-vingt-cinq députés dans un parlement commun siégeant à Vienne. La diète hongroise fut convoquée à Pesth, siégea, prolongea ses débats pendant cinq mois, et fut fermée par ordonnance royale. Il y aura quatre ans de cela au mois d’août ; mais, à la veille même de la clôture de la diète, un discours fut prononcé qui marque le point de départ de presque tout ce qui s’est passé depuis. Un de ceux que le pays entier respecte et écoute, George Maïlath, alors tavernicus (ministre de l’intérieur du royaume), se lève, et, au moment où la nation va de nouveau être condamnée au silence, rappelle à ses compatriotes que, quelque, inadmissible, que soit la constitution de février, ceux qui ont dédaigné la charte d’octobre se la sont attirée en obligeant les ministres allemands de sa majesté à se défendre. Ces paroles ne furent du goût de personne ; toutefois on ne les oublia point, car aucun esprit de parti, aucune violence d’opinion n’eût pu réussir à rendre suspect l’homme qui les avait fait entendre. « Vous vous êtes attiré la constitution de février parce que vous avez si mal reçu les avantages réels offerts en octobre… » Ces mots étaient dits et restèrent, d’abord parce que Maïlath les avait dits, ensuite parce qu’ils étaient vrais.

Maintenant quelle raison donnait la majorité politique en Hongrie et quelle raison donnait le public pour si mal accueillir l’october-diplom ? Principalement celle-ci : qu’il était l’œuvre de gens que le temps et le pays ne connaissaient plus, qu’il partait d’une source tarie, qu’il ne répondait qu’à des besoins surannés, et qu’on était trop avancé pour accepter les théories rétrogrades d’un groupe de « conservateurs, » lesquels étaient « plus Viennois que Hongrois, » et pas « libéraux le moins du monde. » Avec cela, toujours la question des personnes ! On voulait de celle-ci et point de celle-là, et surtout et avant tout on voulait de Déak. Déak était l’idole du moment, le « père de l’heure, » comme disent les Arabes. Or, au. fond, dans tout cela qu’y avait-il de si effrayant ? qu’y avait-il qui nécessitât de la part du gouvernement une mesure à laquelle la Hongrie