Page:Revue des Deux Mondes - 1865 - tome 58.djvu/646

Cette page a été validée par deux contributeurs.

stamment liées à des conditions qui en règlent l’apparition d’une manière déterminée et nécessaire.

Dès qu’on entre dans l’étude des mécanismes propres aux phénomènes de la vie, on s’aperçoit bientôt que la spontanéité apparente dont jouissent les corps vivans n’est que la conséquence toute naturelle de certaines circonstances bien déterminées, et il nous sera facile de prouver qu’au fond les manifestations des corps vivans, aussi bien que celles des corps bruts, sont rattachées à des conditions d’ordre purement physico-chimique. Nous ajouterons que le problème que se posent le physiologiste et le médecin expérimentateur n’est point de remonter à la cause première de la vie, mais seulement d’arriver à la connaissance de ces conditions physico-chimiques déterminantes de l’activité vitale.

Notons d’abord que l’indépendance de l’être vivant dans le milieu cosmique ambiant n’apparaît que dans les organismes complets et élevés. Dans les êtres inférieurs réduits à un organisme élémentaire, tels que les infusoires, il n’y a pas d’indépendance réelle. Ces êtres ne manifestent les propriétés vitales, souvent très actives, dont ils sont doués que sous l’influence de l’humidité, de la lumière, de la chaleur extérieure, et dès qu’une ou plusieurs de ces conditions viennent à manquer, la manifestation vitale cesse, parce que les phénomènes physico-chimiques qui lui sont parallèles s’arrêtent. Beaucoup de ces animaux tombent alors dans un état de vie latente qui n’est autre chose qu’un état d’indifférence chimique du corps organisé vis-à-vis du monde extérieur. Cette suspension complète des manifestations apparentes de la vie est susceptible de durer un temps en quelque sorte indéfini. Spallanzani a vu la vitalité reparaître sous l’influence d’une goutte d’eau chez des anguillules du blé niellé, inertes et desséchées depuis près de trente ans[1]. Dans ce cas l’eau, restituée au corps, y a simplement fait reparaître les phénomènes chimiques, et a permis aux tissus de manifester leurs propriétés vitales.

Dans les végétaux, les phénomènes de la vie sont également liés quant à leurs manifestations aux conditions de chaleur, d’humidité et de lumière du milieu ambiant, et c’est ce qui constitue l’influence des saisons, que tout le monde connaît. Il en est de même encore pour les animaux à sang froid ; les phénomènes de la vie s’engourdissent ou se réveillent chez eux suivant les mêmes conditions climatériques de chaleur, de froid, d’humidité, de sécheresse. Or l’eau, la chaleur, l’électricité, sont aussi les excitans des phénomènes phy-

  1. Spallanzani, Observations et expériences sur quelques animaux surprenans que l’observateur peut à son gré faire passer de la mort à la vie. Œuvres, in-8o, p. 203.