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des résultats décisifs, si les mesures combinées par lui étaient réalisées. Le mémoire, d’après le Times, se terminerait ainsi : « Les mesures que je propose doivent être discutées une à une par les ministres et le gouverneur-général de l’Algérie. Lorsqu’elles seront adoptées, elles formeront un système complet d’administration qui sera suivi en Algérie par l’apaisement des passions et la satisfaction des intérêts. L’Algérie sera alors pour nous, non plus, comme je l’ai dit en commençant, un fardeau, mais un nouvel élément de force. Les Arabes, contenus dans de justes limites et satisfaits, nous donneront ce qu’ils peuvent nous donner de mieux, c’est-à-dire des soldats, et la colonie, devenue prospère par le développement de sa richesse territoriale, créera un mouvement commercial éminemment favorable à la métropole. » Une pareille conclusion est bien faite pour exciter notre curiosité et nous faire dresser l’oreille. L’empereur ne pense-t-il point que, parmi les nombreuses questions qu’il embrasse, il en est, et des plus graves, sur lesquelles l’opinion publique serait en état de l’éclairer mieux que les plus éminens ministres ? Cette idée par exemple de recruter des régimens parmi les Arabes mériterait à elle seule un public examen et de publiques explications. S’il ne s’agit d’employer les troupes indigènes dont on veut accroître le nombre qu’en Algérie, à la bonne heure ; mais s’il était question d’avoir en France des garnisons arabes, si l’on voulait que dans ses guerres avec les nations chrétiennes la France eût, comme la Russie, ses Cosaques et ses Kirghiz, ce serait une autre affaire, et il y aurait lieu de prendre en prompte et sérieuse considération les observations très opportunes présentées par M. Lanjuinais dans la dernière session sur les garanties légales qui doivent entourer l’emploi des troupes musulmanes en Europe.

Les élections municipales qui vont avoir lieu confirmeront, nous n’en doutons point, les symptômes du réveil de l’esprit public que l’on constate partout depuis quelque temps. Les populations urbaines feront triompher les tendances libérales qui se manifestent chez elles. De récentes élections particulières de conseillers-généraux ont montré que le mouvement libéral se poursuit sur la surface du pays avec une fermeté soutenue. L’essentiel dans cette circonstance est que les communes, et les plus considérables surtout, manifestent la volonté de reconquérir leur spontanéité, leur initiative, de donner issue aux forces vives locales, et de s’affranchir de la tutelle de l’administration. L’administration, en ayant la prétention de diriger, quelquefois par une pression directe, le système électoral, a placé la pratique de nos institutions représentatives dans un cercle vicieux. L’objet des institutions représentatives, c’est le contrôle de l’administration. Pour que cet objet soit atteint, il faut que les électeurs gardent dans tous les degrés de la hiérarchie électorale l’indépendance de leur initiative ; mais, quand celui qui doit subir le contrôle pèse sur celui qui doit l’exercer, le jeu des institutions représentatives est faussé. Les instructions très modé-