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dantes de l’issue de la guerre, les progrès futurs seront beaucoup plus rapides que ceux du passé. Chaque année, des espaces considérables sont livrés à la colonisation et à la culture. Les nouveaux états de Nevada, de Colorado, les territoires de Dacotah, d’Arizona, d’Idaho, de Montana, dont l’estimation n’entre même pas dans le recensement de 1860, comptent parmi les contrées du monde les plus riches en métaux précieux, et rivaliseront bientôt en importance avec la Californie. Le gouvernement fédéral possède encore dans les régions de l’ouest et du nord-ouest un domaine de 380 millions d’hectares, qui représente pour le trésor une réserve de 6 milliards de francs, et, chose bien plus importante, ce domaine va se diviser en propriétés dont la valeur imposable s’accroîtra au taux de 455 pour 100 dans l’espace d’une période décennale, comme l’ont fait en moyenne toutes les nouvelles terres mises en culture depuis 1850. En vingt années, la fortune des colons sera trois fois décuplée.

Les jeunes états de l’ouest croissent beaucoup plus rapidement en prospérité matérielle que les états de l’est, plus anciennement peuplés. Les exemples qui prouvent cette supériorité de l’ouest sont des plus frappans. Ainsi, tandis que, durant la période décennale de 1850 à 1860, l’Union tout entière s’enrichissait de 126 pour 100, l’ensemble des valeurs imposables de l’Iowa s’élevait de 128,056,000 à 1,335,625,000 francs, soit de 943 pour 100 ; la Californie montait de 119,669,000 à 1,122,520,000 francs, soit de 838 pour 100. Le progrès était de 550 pour 100 dans le Wisconsin, de 467 pour 100 dans l’Illinois, de 330 pour 100 dans le Michigan. L’état d’Ohio ajouta pendant la même période une somme de 3 milliards 721 millions de francs ou 138 pour 100 à sa richesse totale ; la Pensylvanie, plus populeuse et plus anciennement colonisée, gagna 3 milliards 748 millions ou 96 pour 100, tandis que la somme de 4 milliards 120 millions, dont s’accrut l’actif du grand état de New-York, ne représente pour la période décennale qu’une augmentation de 71 pour 100. Ces sommes ne sont point les revenus des états, mais bien les épargnes que les travailleurs de toute espèce, agriculteurs, industriels, commerçans, ont ajoutées à leur capital, et qui dès maintenant servent à leur tour à développer de plus en plus rapidement la richesse accumulée de la nation.

Ce serait une erreur de croire que les états du nord ont été épuisés ou appauvris par les quatre années de guerre. La preuve, convaincante du contraire est qu’ils ont pu livrer au gouvernement des produits de leur industrie pour une somme d’environ 16 milliards de francs, montant de la dette nationale qui a été entièrement souscrite dans le pays. Le secrétariat des finances n’a point négocié ni vendu à l’étranger, soit directement, soit indirectement, un seul dollar de rente. Sur un emprunt s’élevant aujourd’hui à 14 milliards 230 millions, 1 milliard et demi ou 2 milliards à peine ont pris le chemin des pays étrangers par les voies ordinaires du commerce.