Page:Revue des Deux Mondes - 1865 - tome 58.djvu/473

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

laquelle Hang faisait allusion dans sa dépêche, et sur le résultat de laquelle il s’exprimait en style de bulletin chinois. Tout en se décernant la victoire, le vice-roi avait quelque motif d’être inquiet en voyant que les alliés cherchaient une route pour s’avancer plus loin. Son prétendu triomphe l’effrayait. Retenus quelques jours à Peh-tang par les pluies et par le détestable état des routes, les alliés purent en sortir le 12 août, et ils enlevèrent des ouvrages considérables que les Tartares avaient établis près d’un village nommé Sinko. Le 14 août, ils prirent d’assaut un camp retranché à Tangko. Ces deux engagemens les avaient rapprochés des forts de Takou, qui couvraient les deux rives du Peï-ho, et qu’ils se disposaient à attaquer avec le concours des canonnières et des bâtimens légers mouillés près de l’embouchure du fleuve.

Dès que le vice-roi vit que les alliés avaient quitté Peh-tang, il commença le feu de ses dépêches. Du 14 au 17 août, il écrit chaque jour au baron Gros et à lord Elgin, et chaque jour le ton de cette correspondance devient plus doux et plus insinuant. — Je ne savais pas, dit-il au baron Gros, que vous fussiez ici (et il oubliait que peu de jours auparavant il lui avait fait parler par M. Ward et par le général Ignatief). J’ai tout de suite informé le gouvernement de votre arrivée, et l’empereur a désigné deux hauts fonctionnaires pour conférer avec vous à Pékin. — Vous nous faites la guerre, dit-il par le même courrier à lord Elgin ; mais pourquoi donc ? L’empereur est plein de bonté : l’on vous attend dans la capitale pour négocier. — Dans d’autres lettres, il annonce aux ambassadeurs que l’empereur, prenant en considération le long voyage qu’ils ont dû faire, a daigné nommer les grands dignitaires Ouen et Heng-ki pour s’entendre avec eux. Bientôt Ouen et Heng-ki écrivent eux-mêmes : ce sont en quelque sorte des troupes fraîches, et il faut voir leurs premières manœuvres. Voici leur lettre :


« Nous avons l’honneur de vous faire savoir que l’empereur a donné à Hang, gouverneur de la province du Chih-li, l’ordre de vous adresser, dès votre arrivée à Tien-tsin, une dépêche officielle pour vous engager à venir échanger les ratifications du traité et assurer ainsi une paix éternelle entre les deux empires ; mais sur ces entrefaites nous avons appris que des troupes étaient encore descendues à terre et avaient commencé les hostilités. Nous avons alors reçu un décret de l’empereur, qui nous prescrit de venir vous donner des explications complètes. Sa majesté craignant que le gouverneur du Chih-li n’ait pas su conserver les relations pacifiques qui existaient entre nous, nous sommes arrivés à Tien-tsin pour nous entendre. avec vous et vous accompagner ensuite à Pékin, afin d’y échanger les ratifications du traité et d’assurer ainsi la paix entre les deux empires. Il est urgent que vous nous adressiez une réponse. »