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leurs sommations, en accordant un délai de trente jours pour la réponse. Ces sommations exigeaient des excuses, rechange à Pékin des ratifications des traités, l’exécution complète de ces traités, et enfin une indemnité à raison des préparatifs coûteux que l’Angleterre et la France avaient dû faire pour obtenir satisfaction de la déloyauté des autorités chinoises.

Les réponses du cabinet de Pékin parvinrent à Shang-haï le 4 avril, plusieurs jours avant l’expiration du délai fixé. Au fond, elles étaient absolument identiques, c’est-à-dire qu’elles contenaient un refus très net de satisfaction, accompagné de récriminations plus ou moins vives ; mais, dans la forme, elles présentaient des différences très marquées. En répondant à l’ultimatum de M. de Bourboulon, le gouvernement chinois s’appliquait à mettre la France complètement en dehors de ce qui s’était passé à Takou. — La France, disait-il, n’y est absolument pour rien ; elle n’a pris aucune part à l’attaque. Si son ministre n’est pas venu à Pékin, comme l’a fait le ministre des États-Unis, c’est un simple malentendu. Les demandes de réparation, d’indemnité, etc., ne reposent donc sur aucun fondement. Quant à l’échange des ratifications du traité, le ministre français n’a qu’à s’entendre avec le vice-roi, à Shang-haï, pour la révision de certaines clauses, au sujet desquelles des explications sont nécessaires ; puis, qu’il vienne à Pékin avec une suite peu nombreuse, par la voie de Peh-tang, et tout sera terminé. — La réponse à l’ultimatum de M. Bruce était rédigée en termes tout autres. Le rédacteur du document chinois commençait par raconter à sa façon les événemens de Takou, dont il rejetait la responsabilité sur les Anglais. Pourquoi les Anglais, sont-ils venus avec une escadre, si nombreuse pour l’échange d’un traité de paix ? Pourquoi leur ministre Bruce a-t-il refusé de s’entendre avec les commissaires impériaux envoyés à Shang-haï pour régler l’ordre du voyage à Pékin ? Pourquoi a-t-il voulu forcer le passage du Peï-ho, qui lui était fermé, et pourquoi n’a-t-il pas voulu prendre la route de Peh-tang, qui lui était ouverte ? Les Anglais ne peuvent s’en prendre qu’à eux seuls de l’échec qu’ils ont éprouvé. Ils réclament des indemnités ! mais la Chine a eu à supporter aussi des dépenses de guerre, et il y a au moins compensation. Ils exigent la résidence permanente de leur ministre à Pékin ; mais cela est contraire aux conventions intervenues entre les commissaires impériaux et lord Elgin postérieurement au traité, et la demande est vraiment inconcevable. Est-ce ainsi qu’ils reconnaissent les bontés de l’empereur, qui a daigné leur accorder le bénéfice des diminutions de droits de tonnage stipulées par le traité américain, le seul qui fût exécutoire ? Au surplus, s’ils veulent