du fleuve était barrée et qu’une garnison nombreuse occupait les forts de Takou. On leur dit, il est vrai, que ces mesures de défense avaient été prises en vue des rebelles, et on les engagea à se rendre à Peh-tang, port situé à dix milles plus haut, dans le golfe de Pet-chi-li, où des commissaires impériaux devaient les attendre pour les conduire à Pékin. Ils ne jugèrent point qu’il fût convenable ni digne de modifier leur itinéraire ; c’était par le Peï-ho et par Tien-tsin, par la grande route et non par une voie détournée, qu’ils voulaient arriver à la capitale. Dès lors, sans s’arrêter aux mauvaises raisons ni aux indications peut-être fausses qui leur étaient données, ils convinrent de recourir à la force et invitèrent le contre-amiral Hope à prendre ses dispositions en conséquence. Le 25 juin, l’escadre anglaise, à côté de laquelle se dépliait le pavillon français du Duchayla, attaqua les forts de Takou ; mais elle rencontra des obstacles insurmontables, elle ne put rompre les formidables estacades placées à l’entrée de la rivière et fut exposée pendant tout le jour au feu meurtrier des batteries. Un débarquement, tenté le soir, n’eut pas plus de succès. L’entreprise échoua donc malgré d’héroïques efforts, et les alliés furent obligés de se retirer après avoir éprouvé des pertes sensibles.
Le ministre des États-Unis, SI. Ward, embarqué sur la frégate Powhattan, assistait à ce regrettable incident. Il était venu, lui aussi, pour échanger les ratifications du traité conclu l’année précédente entre la Chine et les États-Unis, et il comptait arriver à Pékin en même temps que ses collègues de France et d’Angleterre. Il ne prit aucune part à la lutte, non-seulement parce qu’il n’avait à sa disposition ni à sa portée aucun moyen d’agir militairement, mais encore parce que le traité américain lui attribuait une situation toute différente. Ce traité se bornait à stipuler que le ministre des États-Unis pourrait venir à Pékin une fois par an avec une suite de vingt personnes, sous la condition d’annoncer sa visite par l’entremise du bureau des rites, et de ne rester que le temps strictement nécessaire pour l’expédition des affaires. Grâce à la clause qui conférait en outre aux États-Unis le traitement de la nation la plus favorisée, le gouvernement et les sujets américains étaient appelés à profiter ultérieurement des conditions plus libérales conquises par les armes des puissances européennes ; mais, tant que les traités de Tien-tsin n’étaient point échangés et mis en vigueur, cette clause demeurait sans application, et jusque-là M. Ward se voyait réduit aux termes restreints de son traité et obligé de se soumettre à la décision du gouvernement chinois quant à la route à suivre pour aller à Pékin. Ce fut ainsi que M. Ward, présent à l’attaque du 25 juin, observa la neutralité, sans dissimu-