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sans dépendance entre elles, ne reconnaissent comme patronage extérieur qu’un chancelier de leur choix, pris parmi les pairs du royaume, et dont les fonctions comportent plus d’honneurs que de pouvoirs. En réalité, ces universités se gouvernent, s’administrent elles-mêmes en vertu d’anciens statuts scrupuleusement obéis. Le respect du passé s’étend jusqu’au costume, qui est encore, même pour les élèves, celui des traditions. Ces franchises sont accompagnées de privilèges qui partout ailleurs sembleraient exorbitans, entre autres une juridiction qui s’étend à la ville où elles siègent et le droit d’envoyer des représentans à la chambre des communes d’après un mode d’élection particulier. Investies des mêmes droits, ces universités ont eu des destinées inégales, et il s’est fait entre elles, par la force des choses, un partage d’attributions. Oxford est restée ce qu’elle était à l’origine, l’une des colonnes de l’église établie, la gardienne des fortes et anciennes études, sans mélange de nouveautés. Cambridge accorde davantage aux sciences et n’est pas, pour l’orthodoxie, en aussi bonne odeur auprès du clergé régulier. Durham, très déchue, manque de caractère propre et se recrute péniblement. C’est dans ces universités que se confèrent les grades académiques de maître, de bachelier et de docteur, suivant les facultés. Ces facultés sont nombreuses et comprennent les lettres, les sciences et les arts ; il y a des docteurs en droit, en médecine, et, ce qui est plus original, même en musique. Deux conditions, le stage et les examens, sont de rigueur pour obtenir ces grades, qui ne sont point uniformes et admettent des degrés d’excellence. Du sein de toute université sort une élite qui se dispute ce qu’on appelle les honneurs. Entre le gros des étudians et les candidats aux honneurs, la distance est grande. Pour les premiers, il ne s’agit que de l’effort nécessaire pour obtenir un titre à peu près insignifiant, l’équivalent d’un certificat de médiocrité ; pour les autres, c’est une entreprise sérieuse, au bout de laquelle il leur est permis d’entrevoir une distinction qui les classe et leur ouvre les grandes carrières. Des avantages positifs y sont d’ailleurs attachés, des prix d’une certaine valeur, des bourses, quelquefois des pensions qui se prolongent au-delà du temps des études.

L’université, en tant que corps, juge directement les élèves ; elle ne les forme qu’indirectement. Autour de son enceinte et comme dépendances sont groupés des collèges nombreux, qui sont autant d’établissemens préparatoires dans toutes les branches de l’enseignement supérieur. Oxford a dix-neuf de ces collèges, Cambridge seize, fondés ou dotés, à diverses époques, par de grands seigneurs, des prélats ou de riches particuliers. Ces dotations ont amplement suffi pour les mettre sur un pied de luxe que la contiguïté des