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touché sans doute des objections secondaires qui comme toujours avaient envahi le débat, n’hésita pas à prendre position et à se retrancher dans cette affirmation si sensée et si péremptoire, que la peine de mort doit être maintenue pour son caractère particulier d’intimidation. Je cite ses propres paroles, qui furent d’ailleurs parfaitement acceptées par la majorité. Telle est donc en définitive la sage conclusion que, malgré une contradiction plus bruyante que solide, on peut, sans trop d’effort, tirer du mouvement des esprits en Angleterre.

J’en voudrais tirer à mon tour cette autre conclusion, fort admise au surplus par les abolitionistes, et qui rentre directement dans mon sujet : c’est que l’intimidation préventive, si particulièrement propre à la peine de mort, serait directement affaiblie, sinon compromise, par la suppression des circonstances atténuantes facultatives, puisque, du moins pour la plupart des crimes, cette suppression aurait pour premier effet d’ouvrir aux malfaiteurs de nouvelles perspectives d’impunité : or ce serait un très grand mal. Je suis donc ainsi ramené à dire, et c’est un des points sur lesquels je devais le plus insister, qu’il y a peu de sagesse à trop décrier les dispositions de l’article 463 du codé pénal. Il résulte en effet assez victorieusement, ce me semble, de tout ce qui précède que la faculté qu’il confère aux juges et au jury d’atténuer les peines occupe une place éminemment utile dans l’économie de nos lois criminelles, soit parce qu’elle en règle et en modifie l’application par des tempéramens sagement appropriés à l’état général des mœurs et des esprits, soit parce qu’elle réduit beaucoup les chances d’impunité en imprimant à la répression une marche plus ferme et plus assurée. Aussi y aurait-il autant d’injustice que d’imprudence à classer encore cette faculté de modérer les peines, comme on n’en a que trop pris l’habitude, parmi les causes les plus actives du mouvement de recrudescence des récidives : il faut oser dire au contraire, et dire bien haut, que tout ce que l’on tenterait de ce côté ne pourrait ni arrêter ni entraver ce mouvement ; il faut oser dire encore, avec non moins d’insistance et d’autorité, qu’on ne pourra réellement le modérer et le contenir que par la réforme même de notre institution criminelle : à un régime usé et impuissant il faut de toute nécessité substituer un régime nouveau prenant sa forcé et sa vertu dans un autre principe. Ce principe, quel est-il ? et comment faudrait-il procéder pour en obtenir les meilleurs résultats ?


II

Quand on considère attentivement la nature des peines et la diversité de leurs modes d’application, on reconnaît bientôt qu’il n’y