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contre la muraille. Il y a là une préoccupation de vérité archéologique qui mérite d’être louée ; mais, puisque M. Lecomte-Dunouy était en veine de recherches, pourquoi s’est-il arrêté en chemin, et pourquoi sur ce merlon de pierre qui fait partie d’un palais d’Argos grave-t-il l’oiseau consacré à Minerve et emblème d’Athènes ? Le demi-loup argien eût été là plus à sa place que la chouette athénienne. Ceci est bien peu important, me dira-t-on ; je le sais. L’art n’est pas la science, je le sais encore et ne les confonds pas. Cependant il était bien facile d’être exact, le tableau y eût gagné une petite saveur archaïque qui ne lui aurait pas nui. Telle qu’elle est néanmoins, et malgré ces très légères critiques de détail, cette toile est honorable, et prouve chez l’auteur un esprit curieux et distingué. En somme, c’est plutôt une vignette qu’un tableau ; c’est une traduction d’Eschyle ad usum Delphini, mais c’est déjà beaucoup que de s’être épris d’un tel poète : si ce n’est un résultat, c’est une promesse bonne à enregistrer, et dont il convient de tenir compte.

Il est un genre de peinture historique qui fut fort à la mode il y a quelque trente ans et qui semble tout à fait tombé en désuétude aujourd’hui : c’est celui qui consiste à reproduire quelques personnages connus concourant à une action commune. Son vrai nom serait la peinture anecdotique. M. Paul Delaroche fut le grand-maître, de cette école médiocre qui ne produisit jamais rien de bien remarquable. Jane Grey, Charles Ier insulté par des soldats, lord Strafford marchant au supplice, prouvèrent que le sujet seul ne constitue pas une œuvre d’art, et n’obtinrent jamais qu’un succès de curiosité. Après M. Paul Delaroche vint M. Gallait, qui raconta sur des toiles emphatiques les principaux épisodes de l’histoire révolutionnaire du Brabant. En général, ces tableaux plaisent à la foule, qui, ne comprenant rien à l’art, n’est avide que d’émotions et s’impressionne à la vue de certaines infortunes qu’on lui représente. Les peintres de ce genre facile ont soin de choisir leurs sujets parmi les faits déjà connus, appréciés, et sur lesquels on s’est passionné. C’est ainsi que M. Müller a fait parler de lui avec ; son Appel des condamnés et que M. Paul Delaroche a remporté un succès d’attendrissement avec sa Marie-Antoinette sortant du tribunal révolutionnaire. Aujourd’hui voici un nouveau venu, un étranger ; il arrive avec une vaste composition où les maladresses ne manquent pas, où les qualités dominent, et qui rappelle cette école dont je viens de. parler. Le nom de M. Matejko indique son origine lithuanienne ; il n’est donc pas étonnant qu’il ait emprunté à l’histoire de Pologne le motif de son tableau : le prêtre Skarga prêche devant la diète de Cracovie assemblée en 159. La plupart des personnages doivent être des portraits, et à ce point de vue peuvent être inté-