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de la religion catholique, apostolique et romaine. Persuadé que cette religion est la seule qui puisse procurer un bonheur véritable à une société bien ordonnée et affermir les bases d’un gouvernement, je vous assure que je m’appliquerai à la protéger et à la défendre dans tous les temps et par tous les moyens. Je vous regarde comme mes plus chers amis ; je vous déclare que j’envisagerai comme perturbateur du repos public et ennemi du bien commun et que je saurai punir comme tel, de la manière la plus rigoureuse et la plus éclatante, et même, s’il le faut, de la peine de mort, quiconque fera la moindre insulte à notre commune religion ou qui osera se permettre le plus léger outrage envers vos personnes sacrées. Mon intention est que la religion chrétienne, catholique et romaine soit conservée dans son entier, qu’elle soit publiquement exercée, et qu’elle jouisse de cet exercice public avec une liberté aussi pleine, aussi étendue, aussi inviolable qu’à l’époque où j’entrai pour la première fois dans ces heureuses contrées. Tous les changemens qui arrivèrent alors, principalement dans la discipline, se firent contre mon inclination et ma façon de penser. Simple agent d’un gouvernement qui ne se souciait en aucune sorte de la religion catholique, je ne pus alors empêcher tous les désordres qu’il voulait exciter à tout prix à dessein de la renverser. Actuellement que je suis muni d’un plein pouvoir, je suis décidé, à mettre en œuvre tous les moyens que je croirai les plus convenables pour assurer et garantir cette religion… La France, instruite par ses malheurs, a ouvert enfin les yeux ; elle a reconnu que la religion catholique était comme une ancre qui pouvait seule la fixer dans ses agitations, et la sauver des efforts de la tempête ; elle l’a en conséquence rappelée dans son sein. Je ne puis disconvenir que j’ai beaucoup contribué à cette belle œuvre. Je vous certifie qu’on a rouvert les églises en France, que la religion catholique y reprend son ancien éclat, et que le peuple voit avec respect ses sacrés pasteurs qui reviennent pleins de zèle au milieu de leurs troupeaux abandonnés… Quand je pourrai m’aboucher avec le nouveau pape, j’espère que j’aurai le bonheur de lever tous les obstacles qui pourraient s’opposer encore à l’entière réconciliation de la France avec le chef de l’église… J’approuverai qu’on fasse part au public, par la voie de l’impression, des sentimens qui m’animent, afin que mes dispositions soient connues non-seulement en Italie et en France, mais encore dans toute l’Europe[1]. »


On devine aisément l’effet produit sur l’auditoire par de pareilles paroles tombées de ces lèvres plus habituées à dicter de brefs commandemens à de vaillans officiers sur les champs de bataille qu’à rassurer par de pieuses promesses de pauvres prêtres tremblans au fond de leurs sacristies. Le retentissement en fut immense, et tel que l’orateur lui-même l’avait souhaité. Qui se souciait alors de s’informer si au Caire, dans la société des ulémas, le même général n’avait point parlé de la religion du prophète à peu près dans les

  1. Correspondance de l’empereur Napoléon Ier, t. VI, p. 339, 340, 341.