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LE MAGNE


et


LES MAINOTES


récits et scènes de mœurs de la grèce.




La Grèce est tourmentée aujourd’hui d’une grande ambition, et donne en même temps à ses amis un inquiétant spectacle. Cette grande idée dont elle parle tant, et qui signifie l’affranchissement complet de la race hellénique, elle rêve de la propager par les armes, par les aventures révolutionnaires, et ne s’aperçoit pas qu’il est un moyen bien plus simple et bien plus sûr de la faire triompher : c’est de travailler sérieusement à l’œuvre de sa régénération intérieure, à peine ébauchée pendant le cours des trente dernières années. Ce n’est plus en effet par l’héroïsme ni par la force des armes, mais bien plutôt par la force du progrès moral et de la civilisation, que la Grèce pourra s’emparer du rôle qu’elle ambitionne en Orient. Avant d’élargir ses étroites limites, que de conquêtes n’a-t-elle pas à faire sur elle-même ! Surtout à cette heure où elle commence à s’interroger non plus seulement sur ses forces morales, mais sur ses ressources matérielles, ce n’est pas remplir une tâche inutile que de lui montrer, par quelques exemples significatifs, combien de travaux pacifiques lui sont encore imposés par l’état de plusieurs parties de son territoire. Il est une contrée entre autres que nous visitions il y a quelques années, et qui aujourd’hui encore n’a rien perdu de la physionomie sauvage qui nous frappait alors. C’est le Magne, région inculte, sauvage, inexplorée des voyageurs, redoutée des Grecs eux-mêmes. Nulle part cependant