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Ces actes, et d’autres semblables, produits au nom du droit moderne, ces moyens développés par l’église en sa simple qualité d’église libre dans des états libres, sans autre protection séculière que celle du droit commun, sont-ils frappés de stérilité comme les concordats d’intolérance dont ils sont contemporains ? Non, ils se maintiennent au contraire avec une solidité et une sécurité proportionnelles à la largeur de base des institutions qui les ont acceptés. Ainsi les grandes transactions accomplies sous ce règne en vertu de l’ancien régime ecclésiastique, loin de produire le bien au point de vue même de l’église, n’ont abouti qu’au néant ou au mal ; toutes celles qui sont faites sous la protection du droit fondamental de la société moderne subsistent, et permettent à l’église de développer, sans autre limite que la liberté des autres, toute la force qui est en elle.

Voilà sans doute un signe du temps, s’il en fut. C’est un de ces exemples où l’on voit les choses encore enveloppées d’ombre se remuer d’elles-mêmes, et indiquer le chemin qu’elles veulent suivre. Lors donc que la nécessité des circonstances, qui est la parole de Dieu, a dit son dernier mot, quand toutes les résistances sont épuisées et toutes les responsabilités couvertes, n’est-il pas temps de reconnaître, avec Chiaramonti, avec Pacca, ce qu’il y a, pour la papauté, de ressources et de grandeurs dans le nouvel âge qui s’ouvre devant elle ? N’est-il pas temps qu’elle puise désormais son indépendance, non plus dans des institutions caduques, mais dans son âme délivrée de leur poids et rajeunie, sa force, non plus dans des lois de police, mais dans de nouveaux élans de la pensée, qu’elle laisse tomber, si elle a foi en sa propre vitalité, une dépouille usée qui n’en a plus, qu’elle écoute enfin la forte voix du grand Dante, qui l’accusa souvent en la vénérant toujours, et qui lui crie encore : « Sépare-toi, âme vivante, de ceux-là qui sont morts ! »

Anima viva,
Partiti da cotesti che son morti !


LOUIS BINAUT.