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qui s’élève par d’incessans progrès, qui cherche les institutions libres qui doivent mettre sa marche future à l’abri des accidens du pouvoir. Ce n’est point en développant la vie politique intérieure de la France, c’est en poursuivant au dehors des combinaisons sur lesquelles la France n’avait point été consultée que Napoléon a succombé victime des accidens militaires. Il eût eu un sort bien différent, s’il avait pratiqué sur le trône le libéralisme qu’il professa à Sainte-Hélène. Enfin nous ne saurions admettre que la faute de Brutus, en tuant César, a été de rendre possibles les règnes de Caligula et de Néron. La grande leçon et la peine morale de l’action de Brutus ont été l’inutilité de son crime patriotique ; mais l’horreur et la honte des règnes de Caligula et de Néron sont aussi la leçon et le châtiment moral du grand homme qui fonda la tyrannie, mit dans les mains d’un seul tous les pouvoirs de l’empire, et prêta la force de son nom pendant des siècles aux caprices arbitraires de ses indignes successeurs. Le poignard de Brutus a ennobli du moins la mort de César ; il donne une fin pathétique à cette grande vie, il est le dénouement d’un drame grandiose de la conscience humaine. Galba égorgé par terre au coin d’une rue par des soldats ivres, Héliogabale étouffé par des affranchis dans une retraite honteuse, pouvaient envier à César le poignard de Brutus ; mais la tyrannie avait achevé son œuvre de dégradation, et les meurtriers valaient les victimes.

La préface de l’Histoire de César nous promet donc que cette œuvre, qui, venant d’un souverain, est en soi un acte très libéral, éveillera d’intéressantes controverses non-seulement sur les questions d’érudition, mais sur les questions politiques qui préoccupent le présent. La préface se termine par une curieuse peinture des grandes questions résolues, des passions apaisées, des satisfactions légitimes données aux peuples par le premier empire. » Nous ne savons trop à quel moment du premier empire cette peinture est applicable ; il nous semble qu’en plusieurs traits elle exprimerait plus exactement la situation présente suivant l’idée qu’en donne le discours d’ouverture de la session. Tout le monde a remarqué par quel heureux, contraste le discours de cette année se distingue de celui de l’année dernière. Il y a un an, on nous faisait un tableau fort inquiétant de l’Europe ; un congrès seul était capable de conjurer tous les maux qui paraissaient près de se déchaîner sur le continent. Il n’y a pas eu de congrès ; quelques méfaits ont été accomplis en Europe, trop loin de nous pour que nous les pussions prévenir ou réprimer, et le calme est revenu. L’aspect des choses est décidément pacifique. En matière de politique étrangère, la portion la plus importante du discours impérial est celle qui est relative à la convention du 15 septembre. Nous trouvons dans les explications données par l’empereur sur le caractère et la portée de cet acte diplomatique la confirmation des appréciations que la convention nous a inspirées dès le premier jour. Nous ne dissimulerons point que la posi-