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présent, c’est à l’existence d’un mécanisme nerveux tout particulier, qu’il nous reste à examiner.


III.

La réaction bien connue des nerfs moteurs sur les muscles en général se résume en cette proposition fondamentale : tant que le nerf n’est point excité, le muscle reste à l’état de relâchement et de repos ; dès que le nerf vient à être excité naturellement ou artificiellement, le muscle entre en activité et en contraction. L’observation de l’influence de notre volonté sur les mouvemens de nos membres suffirait pour nous prouver ce que je viens d’avancer ; mais rien n’est en outre plus facile à démontrer par des expériences directes faites sur des animaux vivans ou récemment morts. Si par vivisection on prépare une grenouille de manière à isoler un nerf qui se rend dans les muscles d’un membre, on voit que, tant qu’on ne touche pas à ce nerf, les muscles du membre restent relâchés et en repos, et qu’aussitôt qu’on vient à exciter ce nerf par le pincement ou mieux par un courant électrique, les muscles entrent en une contraction énergique et rapide. C’est là un fait général qui peut se constater expérimentalement chez l’homme et chez tous les animaux vertébrés, soit pendant la vie, soit immédiatement après la mort, tant que les systèmes musculaires et nerveux conservent leurs propriétés vitales respectives. Si maintenant nous agissons par des procédés analogues sur les nerfs du cœur, nous verrons que cet organe musculaire paradoxal nous présente encore à ce point de vue une exception, et je dirai même, pour être plus exact, qu’il nous offre une complète opposition avec les muscles des membres. Pour être dans la vérité, il suffira de renverser les termes de la proposition et de dire : Tant que les nerfs du cœur ne sont pas excités, le cœur bat et reste à l’état de fonction ; dès que les nerfs du cœur viennent à être excités naturellement ou artificiellement, le cœur entre en relâchement et à l’état de repos. Si on prépare par vivisection une grenouille ou un autre animal vivant ou récemment mort de manière à observer le cœur et à isoler les nerfs pneumo-gastriques qui vont dans son tissu, on constate que, tant qu’on n’agit pas sur ces nerfs, le cœur continue à battre comme à l’ordinaire, et qu’aussitôt qu’on vient à les exciter par un courant électrique puissant, le cœur s’arrête en diastole, c’est-à-dire en relâchement. Ce résultat est également général ; il existe chez tous les vertébrés depuis la grenouille jusqu’à l’homme. Il faudra toujours avoir présent à l’esprit le fait de cette influence singulière et paradoxale des nerfs sur le cœur, parce que c’est ce résultat qui nous servira de point de