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organes du corps. Il nous suffira donc de dire qu’au moment de la contraction de ce ventricule le cœur se projette en avant, et vient frapper comme le battant d’une cloche entre la cinquième et la sixième côte au-dessous du sein gauche ; c’est ce qu’on appelle le battement du cœur. À ce même instant de la contraction du ventricule gauche, le sang est lancé dans l’aorte et dans les artères du corps avec une pression capable de soulever une colonne mercurielle d’environ 150 millimètres de hauteur. C’est ce qui produit le soulèvement observé dans toutes les artères, et qu’on appelle le pouls.

Toute la mécanique des mouvemens du cœur a été l’objet de travaux extrêmement approfondis, et la science moderne a étudié les phénomènes de la circulation à l’aide de procédés graphiques qui donnent aux recherches une très grande exactitude. Le seul point que nous tenions à rappeler, c’est que le cœur est une véritable machine vivante, qui fonctionne comme une pompe foulante dans laquelle le piston est remplacé par la contraction musculaire. La question que nous désirons plus particulièrement examiner dans cette étude est celle de savoir comment le cœur, ce simple moteur de la circulation du sang, peut, en réagissant sous l’influence du système nerveux, coopérer au mécanisme si délicat des sentimens qui se passent en nous.


II.

Le cœur nous apparaît immédiatement comme un organe étrange par son activité exceptionnelle. Dans le développement du corps animal, chaque appareil vital n’entre en général en fonction qu’après avoir achevé son évolution et acquis sa texture définitive. Il y a même des organes, particulièrement ceux destinés à la propagation de l’espèce, qui ne se montrent sur la scène organique que longtemps après la naissance pour en disparaître ensuite et rentrer de nouveau dans la torpeur pendant la dernière période de la vie de l’individu. Le cœur au contraire manifeste son activité dès l’origine de la vie, bien longtemps avant de posséder sa forme achevée et sa structure caractéristique. Ce fait n’est pas seulement remarquable comme caractère de la précocité des fonctions du cœur, mais il est de nature à faire réfléchir profondément le physiologiste sur le rapport réel qui doit exister entre les formes anatomiques et les propriétés vitales des tissus. Rien n’est beau comme d’assister à la naissance du cœur. Chez le poulet, dès la vingt-sixième ou trentième heure de l’incubation, on voit apparaître sur le champ germinal un très petit point, punctum saliens, dans lequel on finit