Page:Revue des Deux Mondes - 1865 - tome 56.djvu/151

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

possèdent pas de bâtimens de guerre proprement dits[1] ; les divers aménagemens du navire, principalement la structure et la manœuvre des pièces rayées de gros calibre et des canons de 4, parurent les intéresser vivement. Après avoir promis de revenir dans un court délai, ils reprirent dans leur convoi de bateaux la route de Kanagava.

Pendant que se préparait de la sorte une solution des difficultés pendantes entre le Japon et la France, la situation avait pris également, du côté des Anglais, un nouvel aspect. Depuis l’affaire de Kagosima, on ne savait rien des intentions du prince de Satzouma ni de celles du taïkoun en cas de conflit nouveau. Or, à l’heure où le gouvernement anglais écrivait à son agent à Yokohama de ne pas donner suite à l’ultimatum signifié une première fois avec si peu de succès, de maintenir le statu quo et d’indemniser les victimes de l’attentat Richardson avec 25,000 livres prélevées sur les 100,000 payées par le taïkoun, à ce même moment le bruit se répandait à Yokohama que des officiers du prince de Satzouma, porteurs de propositions de leur maître, venaient d’arriver. Le jour même, quelques heures après, ces officiers avaient paru à la porte de la légation britannique, conduits par un délégué du gouverneur, et le colonel Neal avait consenti à leur accorder pour le lendemain 9 novembre une conférence officielle. Deux entrevues eurent lieu en effet. Dans la première réunion, les officiers avaient expliqué les motifs de l’agression subie par la flotte anglaise : le prince, prenant la confiscation de ses navires pour les débuts d’une attaque en règle et non pour une mesure provisoire destinée à hâter ses résolutions, avait fait ouvrir le feu. Sa ville et ses bâtimens avaient été détruits, et il pouvait, à ce titre, réclamer de son côté une indemnité du gouvernement anglais. Ce début peu encourageant n’était toutefois que l’application du système habituel aux diplomates japonais : exiger l’impossible, pour paraître ensuite faire des concessions. À la seconde séance, pressés par M. Neal, les envoyés, déclarant reconnaître la justesse des demandes de l’Angleterre, avaient promis la recherche active des coupables du meurtre de Richardson et le paiement immédiat des 25,000 livres. Près d’un mois s’était écoulé sur cet engagement formel, sans que rien en eût pu faire entrevoir l’exécution et que les envoyés du prince eussent donné le moindre signe de vie, lorsqu’enfin le 11 décembre ces derniers reparurent à Yokohama, apportant en dollars mexicains le montant total de l’indemnité. Le paiement se fit sur-le-champ,

  1. A l’heure qu’il est, le gouvernement de Yédo fait construire en Europe plusieurs corvettes de guerre, dont une à batterie blindée.