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supérieure. L’ancien régime, n’accordait que 25,887 fr. à l’université de Naples ; l’Italie, du premier jour, lui fit une rente de 93,600 fr. Aussitôt furent commencées les réparations urgentes. L’herbe poussait dans les salles fétides, on leur donna de l’air et du jour, on y plaça des tables et des chaises ; on agrandit le palais des études (l’ancien cloître du Gesù-Vecchio), qui envahit les édifices voisins, et malgré cet envahissement se trouva trop étroit encore. Les anciennes collections, les cliniques, les cabinets, furent enrichis, agrandis, multipliés ; un magnifique amphithéâtre de chimie sortit de terre. Le professeur Sebastiano de Luca, bien connu en France, trouva enfin une salle et des laboratoires dignes d’un grand pays. Le jardin botanique a cessé d’être un désert, et la bibliothèque de la ville, qui n’avait autrefois ni lecteurs ni livres, s’est tellement développée qu’elle menace d’envahir toute l’université. Six cents étudians, population flottante qui se renouvelle d’heure en heure, y sont constamment réunis. Parmi ces améliorations, la plus importante fut le renouvellement des professeurs. Malgré l’isolement où l’on vivait sous l’ancien régime, il s’était formé dans toutes les branches assez de savans pour que l’université pût en fort peu de temps être repeuplée presque exclusivement avec des Napolitains. L’un arrivait du haut d’une montagne, l’autre du fond d’un cachot, quelques-uns avaient disparu depuis dix ans ; on les croyait morts. Ils vivaient pourtant, et ils vivent[1].

Ce n’est pas tout : l’enseignement supérieur a été discipliné, soumis à un contrôle sévère. On se souvient qu’avant 1848 le roi Ferdinand II, pour empêcher l’agglomération des étudians à l’université, leur avait permis de se disperser dans les écoles privées. On a vu que ce système avait fait alors moins de tort aux lettres que ne l’espéraient peut-être les conseillers du souverain, et l’on n’a pas oublié les noms des hommes éminens qui réunirent en ce temps-là

  1. Dans la faculté des lettres (comprenant la philosophie) furent aussitôt installés le compagnon de Poerio, M. Luigi Settembrini, la plume la plus alerte et la plus vive du pays, M. Bertrando Spaventa, M. Tari, M. de Blasiis, M. Calvello, M. Abbignente, tous Napolitains sortant du bagne, ou de l’exil, ou du désert. La faculté de droit compte parmi ses professeurs des hommes tels que Enrico Pessina, Luigi Capuano, Francesco Pepere, et deux ministres récens du royaume d’Italie, MM. Manna et Pisanelli. La faculté de médecine est plus riche encore, et tous ceux qui étudient cette science connaissent les noms de Francesco Prudente, Giuseppe Capuano, de Renzi, Castorano, Palasciano, de Martini, de Sanctis. Les deux autres facultés, celle des mathématiques et celle des sciences naturelles, sont les plus remarquables de toutes. Les mathématiciens de Naples sont justement célèbres en Allemagne : ils se nomment Fortunato Padula, Giuseppe Battaglini, Raffaele Rubini, Remigio del Grosso, de Gasparis (l’astronome qui a découvert tant de planètes). Quant aux naturalistes, malgré la mort de Melloni et de Tenoro, ils sont encore nombreux et connus partout, Arcangelo Scacchi le cristallographe, Sebastiano de Luca le chimiste, Gasparrini le botaniste, Costa l’entomologue, Luigi Palmieri le savant du Vésuve, sont de Naples et professent à Naples.