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fique et agricole. Quoique à peu de distance des iron-7works, elle ne s’aperçoit guère du voisinage des mines que par le bon marché du fer converti en instrumens aratoires. Ce qui frappe tout d’abord, c’est le costume des femmes de la campagne. Ce costume consiste en un jupon rouge surmonté d’un casaquin de laine bleue, ouvert et flottant, maintenu seulement autour de la taille par le cordon du tablier. Un chapeau d’homme en feutre noir, ressemblant, pour la forme, à ces tuyaux d’argile qu’on pose en Angleterre sur les cheminées, chimney pots, recouvre un bonnet blanc comme la neige qui entoure la chevelure et se noue sous le menton. C’est surtout le samedi, jour de marché, que je pus observer à loisir ce vêtement bizarre. Le marché, qui se compose de deux cours quadrangulaires, l’une réservée pour les provisions de toute espèce, l’autre servant de porcherie, est un beau bâtiment neuf, avec des hangars et des magasins. Les fermières des environs arrivaient avec des corbeilles remplies de fruits, de légumes, d’œufs et de volailles. L’une d’entre elles, pimpante et jolie, conduisait elle-même une élégante voiture du pays, entièrement découverte et traînée par un poney welshe à l’œil plein de feu. Elle paraissait fière de porter le costume national, et comme si c’était un privilège de la jeunesse d’embellir tout autour d’elle, le chapeau de feutre n’avait point du tout mauvais air sur sa tête.

Ce qui rachète en général l’excentricité du vêtement chez les riches paysannes galloises est une propreté délicate. Et pourtant le vieux costume tend chaque jour à disparaître : à Newport, à Cardiff, on ne le rencontre presque plus. Une jeune fille restée fidèle à la mode de ses ancêtres est accueillie dans les rues avec un sourire moqueur. Les grand’mères en gémissent : avec le costume qui s’en va se perdent aussi, suivant elles, les derniers lambeaux de la nationalité bretonne. Il n’y a plus guère que les campagnes où la force de l’usage se fasse encore respecter. Là, les femmes tiennent tant au chapeau qu’elles le portent jusque dans la maison. Je me souviens d’avoir vu dans un humble cottage trois vieilles paysannes qui prenaient le thé autour d’une petite table ronde, et qu’à leur coiffure j’avais prises d’abord pour trois hommes. Cette coiffure singulière a pourtant sa raison d’être : elle convient au climat. Dans un pays fort exposé aux injures des élémens, le chapeau de feutre à forme haute et à larges bords ne protège pas seulement la figure, il défend la tête et le bonnet blanc contre les pluies qui tombent durant une grande partie de l’année.

Le costume des paysannes welshes étonne à première vue; leurs mœurs ne présentent-elles point aussi quelques singularités? Les jeunes gens et les jeunes filles ont une manière assez étrange de se