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VERONICA SILVESTRIS.


Chantez-lui, pinsons et ramiers,
Ces mélodies
Dont jadis vous accompagniez
Nos causeries.

Et vous, véroniques des bois,
Vous ses marraines,
Ouvrez vos fleurs entre ses doigts
Sous les grands chênes ;

Puis parlez-lui, prenez ma voix,
Soyez moi-même ;
Dites-lui toutes à la fois
Comme je l’aime !


IV. — VEILLÉE DANS LES BOIS.


La nuit est noire. À tout instant
La forêt, prise d’épouvante,
Tord ses grands bras verts. On entend
Dans les feuilles l’eau ruisselante.

Au logis du vieux braconnier
Tout est clos. — Les fils et le père.
Suivis d’un maigre lévrier,
Sont à l’affût dans la clairière. —

Un enfant dort dans son berceau,
Auprès du grand fit de l’aïeule ;
Assise et filant au fuseau,
La jeune fille veille seule.

La lampe au lumignon tremblant
Faiblement éclaire une joue.
Un coin d’oreille et le cou blanc
Où le lourd chignon se dénoue.

Elle est belle. Son sein d’enfant,
Son sein tiède parfois palpite ;
Est-ce la peur, l’air étouffant,
Ou bien l’attente qui l’agite ?…

La porte glisse sur ses gonds.
Et la rafale pluvieuse
Pousse un jeune homme aux cheveux blonds
Dans la chambre silencieuse.