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tout caractère d’une pression factice, exercée dans le sens de l’abaissement de l’intérêt, il serait nécessaire d’exiger, comme on l’a fait en 1847 et en 1857, que la Banque ne diminuât point l’escompte tant qu’elle ne serait pas rentrée dans la stricte exécution de la loi qui règle la quotité normale de l’émission. Chose bien remarquable, tandis que chez nous on attaque la Banque quand elle élève le taux de l’escompte au moment où la baisse du change lui en fait une loi, de l’autre côté du détroit, dans des circonstances analogues, le gouvernement, en 1847 et en 1857, n’a autorisé une circulation additionnelle des billets que sous la condition formelle imposée à la Banque de ne point diminuer le taux de l’intérêt. Il a permis ainsi de pourvoir à une nécessité du règlement des comptes, sans porter atteinte au principe en vertu duquel le capital métallique du pays peut se reconstituer. On n’a même pas eu besoin de recourir à ce moyen extrême en 1864 : la hausse de l’escompte a suffi pour ramener l’équilibre; la crise s’est dénouée sans graves désastres des deux côtés du détroit, grâce à l’énergie de la direction imprimée à la Banque d’Angleterre comme à la Banque de France. Ceux qui prétendent que la hausse temporaire et indispensable de l’escompte a été mal vue par le commerce anglais, et doit amener l’abrogation du principe sur lequel repose le statut actuel, se trompent. Ce statut détermine la distinction essentielle entre le droit d’émission des billets, minutieusement réglé comme touchant à l’intérêt général, et la véritable fonction des banques, qui est de mettre en présence le capital réel et le travail, fonction qu’elles continuent de remplir en pleine liberté. La loi, en limitant l’émission et en la concentrant, oblige la Banque de recourir, en temps de crise monétaire, à une élévation de l’escompte. Loin de condamner cette mesure, le commerce anglais y applaudit. Quant au gouvernement, on peut juger de ses tendances par l’opinion de l’homme d’état éminent qui dirige avec tant d’habileté les finances de la Grande-Bretagne. Cette opinion, qu’il nous communiquait à propos de notre ouvrage sur la question des banques, nous avons demandé à l’invoquer publiquement, et il a eu l’obligeance de la formuler de nouveau dans une lettre du 24 décembre 1864, que nous croyons devoir citer textuellement. « Je vous ai écrit le 8 octobre, nous dit M. Gladstone, en exprimant, entre autres choses, mon avis que la distinction tracée par vous entre l’office de la Banque et la fonction de l’émission était une distinction à la fois saine et vitale, et en témoignant la satisfaction avec laquelle je vous ai vu employer, par votre publication, le moyen le plus propre pour faire pénétrer vos idées dans les esprits. J’oserai ajouter aujourd’hui, ce qu’avec vos vues sur l’act de 1844 vous serez bien aise d’apprendre, que durant la dernière crise le gouvernement de la Banque d’Angleterre a été