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dent au moyen de mandats sur la Banque d’Angleterre, qui leur sert de point d’appui et leur permet de profiter du réservoir métallique de Londres. Tout en rendant pleine justice à la bonne tenue et aux avantages des banques d’Écosse, nous ferons remarquer qu’elles sont taillées sur un patron distinct, et qu’elles font un usage très discret des billets de banque ; leur principale et presque leur unique ressource leur est fournie par les dépôts, qu’une plus grande masse de billets payables à vue ne manquerait point d’écarter. Enfin le principe de la solidarité indéfinie des associés leur conserve une direction prudente. Le nombre des banques qui émettent des billets est très faible, la quotité de la circulation est strictement limitée, aucune banque nouvelle d’émission ne peut se fonder ; tous ces établissemens s’alimentent en partie à la Banque d’Angleterre, quoique l’Écosse continue à être un pays distinct par sa législation. Il est difficile de découvrir dans cet ensemble quelque application sérieuse du principe de la concurrence et de la liberté des banques[1]. Les économistes allemands, qui penchent vers la liberté des banques d’émission, ne séparent point ce principe de celui de la responsabilité solidaire des associés, et ils s’appuient à cet égard sur les précédons établis en Écosse. Ceux qui livrent aujourd’hui assaut à la Banque de France sont loin de l’entendre ainsi : ils voudraient limiter les risques des associés tout en étendant la faculté d’émission. La liberté qu’ils invoquent est hors de cause dans une pareille hypothèse, car la constitution d’une société anonyme crée toujours un privilège.

On présente la concurrence comme le levier à l’aide duquel le pays verrait multiplier la monnaie fiduciaire et baisser le taux de l’escompte. La disponibilité constante du capital des banques suffirait, dit-on, pour prévenir les crises monétaires ; il faut se garder du placement en rentes. Le système des banques américaines, dont on a voulu invoquer l’exemple pour l’opposer triomphalement au régime de la Banque de France, est cependant fondé sur le monnayage de la rente, ce qui en fait un système peu recommandable. Le capital des institutions de crédit des États-Unis, converti en fonds publics, sert de base et de mesure à l’émission des billets ; aucune limite n’est imposée à la matière ainsi monnayable. Bien de plus faux ni de plus dangereux qu’un pareil système, qui n’assure pas même le bon marché de l’escompte. Le taux en effet a été pres|que}}

  1. Il est à remarquer que les garanties dont le système des banques d’Écosse se trouve entouré n’ont pas empêché deux grands établissemens financiers de ce pays de sombrer en 1857, la Western Bank avec un capital de 1,500,000 livres sterling (37,500,000 francs), et la Glasgow City Bank avec un capital de 1 million de livres sterling (25 millions de francs). Ces désastres ont même été, au dire de Mac-Culloch, la cause première de la suspension de l’act de 1844.