Page:Revue des Deux Mondes - 1865 - tome 55.djvu/683

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

résulté? Des crises violentes, des faillites innombrables, des ruines multipliées. Il faut avoir la mémoire courte pour ne pas se souvenir de cette période de vingt années, marquée par des désastres répétés, et des cris de détresse qui retentissaient des deux côtés de l’Océan. Les hommes les plus considérables de l’Amérique, Gallatin, Webster, Buchanan, ont condamné les tristes résultats d’un principe faux. L’Angleterre les a également signalés par l’organe de ses plus illustres économistes. Son grand homme d’état, sir Robert Peel (dont M. Gladstone, — le meilleur chancelier de l’échiquier que ce pays ait encore possédé au jugement de Cobden, — recueille fidèlement l’héritage), s’est efforcé, sinon d’en empêcher entièrement le retour, du moins d’en affaiblir la fatale influence. Il est vrai que nos modernes financiers dédaignent ces glorieux représentans de l’étude et de l’expérience. Que leur importent Adam Smith, Ricardo, Rossi, Overstone, Torrens, Sismondi, Jean-Baptiste Say et Léon Faucher? Ne sont-ils pas en train de construire une économie politique nouvelle qui enveloppe dans un même dédain la vieille science et les faits accomplis? — On se refuse à reconnaître que l’Angleterre s’est efforcée résolument de proscrire la concurrence dans l’émission des billets qui tiennent lieu de monnaie; on passe sous silence les conditions spéciales dans lesquelles s’est développé le système des banques d’Ecosse; on ne dit rien des tendances nouvelles des États-Unis. Ce sont autant de points sur lesquels il est bon de s’entendre.

L’act de I844 a défendu de fonder en Angleterre aucunes nouvelles banques d’émission. Le respect pour le principe sacré de la non-rétroactivité a fait tolérer l’existence de celles qui fonctionnaient alors; mais la faculté dont chacune d’elles peut user a été limitée à la moyenne de la circulation des deux années antérieures. On a multiplié les clauses destinées à faire refluer, au fur et à mesure de l’extinction, ces droits fractionnés vers la Banque d’Angleterre, seule investie d’un privilège permanent. En 1826, on comptait 809 banques; il n’en restait que 584 en 1833, et 300 en 1844, entre lesquelles se trouva répartie la faculté d’émettre 8 millions de livres de billets (200 millions de francs). Un tiers de ces banques a déjà succombé; quelques-unes ont abandonné, au bénéfice de la Banque d’Angleterre, la part afférente du droit d’émission. Au 17 septembre de l’année dernière, la circulation de cet établissement était de 20,618,682 livres sterling (près de 620 millions de francs). Les banques privées (private-banks), qui ne peuvent compter au-delà de six associés, avaient en cours 2,971,725 livres sterling de billets (un peu plus de 74 millions de francs), et pour les joint-stock-banks (banques par actions) ce chiffre n’était que de 2,788,896 livres sterling (environ 70 millions de francs). Le total