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7 milliards 1/2 pour 1864. La valeur en est donc plus que triplée depuis vingt ans, plus que doublée depuis dix ans, et accrue d’environ 50 pour 100 depuis que nous profitons de la liberté commerciale. Quelle immense révolution dans les rapports de la production et de l’échange ! Cette révolution s’est surtout manifestée dans nos relations avec l’Angleterre. Les importations de ce pays en France n’étaient en 1827 que de 14 millions, en 1847 de 72, en 1857 de 321 ; elles ont monté à 525 millions en 1862, et à 691 millions en 1863 ; nos exportations à la destination de la Grande-Bretagne étaient de 107 millions en 1827, de 155 en 1847, de 548 en 1857, de 619 en 1861 et de 834 en 1862 ; elles se sont élevées à plus de 1 milliard en 1863. Ces chiffres d’importation et d’exportation ont encore grandi en 1864, et les différences du commerce spécial sont plus fortes que celles du commerce général.

Quand la masse des échanges décuple en moins de vingt ans et double en quelques années entre la France et l’Angleterre, quand celle-ci est devenue notre plus riche cliente, faut-il donc s’étonner que la situation du marché anglais agisse sur la nôtre ? plus que jamais, en ce qui concerne surtout le capital sous la forme la plus fluide, les paroles de Mengotti rencontrent leur application : « Le numéraire est essentiellement rebelle aux ordres de la loi ; il vient sans qu’on l’appelle ; s’en va, quoiqu’on l’arrête, sourd aux avances, insensible aux menaces, attiré seulement par l’appât des profits. » Pour l’empêcher de partir quand il s’en va, ou pour le rappeler quand il est parti, il n’y a qu’un moyen efficace, c’est d’élever la rémunération qu’on lui accorde. On peut discuter sur la quotité de l’écart admissible sans perturbation entre le taux de l’escompte à Londres et le taux de l’escompte à Paris ; mais au-delà d’une limite assez restreinte il est impossible, pour quiconque a la moindre notion des facilités et de l’importance du commerce du papier sur Londres, de nier que dans l’état actuel des relations commerciales entre les deux pays la Banque de France ne saurait fermer les yeux sur les décisions prises par la Banque d’Angleterre, et réciproquement.

Quel a été le taux de l’escompte de la Banque d’Angleterre durant l’année 1864 ? Qui a pris l’initiative de l’élévation de ce taux ? Dans quelle proportion cette initiative s’est-elle exercée par la suite ? Quel écart a été maintenu, et au profit de quel pays ? Voilà des questions d’une grave importance dans le débat qui s’agite, et dont le tableau suivant nous offre la solution.