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LES
TRISTESSES HUMAINES

Les Tristesses humaines, par l’auteur des Horizons prochains.

Les nouveaux critiques nous apprennent que le talent dépend de l’air qu’on respire. Le lieu où vous avez vu le jour tient de sa position sur le globe et de sa constitution géologique un certain climat, une flore, une faune, et de toutes ces causes résultent pour l’homme une nature organique, un tempérament spécial qui décidera de ses aptitudes comme de ses sentimens. Ce sont là les circonstances qui feront de vous un philosophe, un écrivain, un artiste, un poète, et qui même détermineront le caractère de votre philosophie, de votre style, de votre art, de votre poésie. Le don des muses est une question de physiologie. L’inspiration vient des vents et des eaux. La terre produit le génie comme une autre plante, et c’est la nature extérieure qui pense ou qui chante en nous.

S’il fallait en effet, au nom de la science, analyser toutes les causes qui font d’un individu ce qu’il est, aucun des faits de cet ordre ne paraîtrait entièrement étranger à son organisation physique et morale. Notre personnalité, notre vie est quelque chose de si complexe que des variations infiniment petites dans les élémens qui composent notre être ou les influences qui le modifient doivent contribuer à produire les différences, les inégalités de tous genres auxquelles est sujet le type de l’humanité ; mais ce sont là des conjectures qui n’expliquent rien : auprès des faits assignables, il y en