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C’est encore un avantage que l’Australie a sur la Californie, dont l’or n’a, dit-on, qu’un degré de pureté bien inférieur. En général, c’est de l’argent qui est allié à l’or. Il en est résulté que les pièces frappées à l’hôtel des monnaies de Sydney ont une plus-value intrinsèque assez considérable, — cet établissement n’ayant pas à sa disposition des appareils assez perfectionnés pour affiner l’or qu’il emploie, — et que des spéculateurs fondent la monnaie qui en sort afin de profiter de cet excédant de valeur.

La géologie des terrains aurifères a été créée depuis une quinzaine d’années, depuis les fameuses découvertes de la Californie et de l’Australie ; cette science toute nouvelle, si riche aujourd’hui de faits et d’expérience, était auparavant à peine connue. Elle s’est développée cependant moins vite encore que ne se sont transformées les contrées où le précieux métal s’est tout à coup révélé. Après avoir entendu parler de l’époque d’agitation et de bouleversement social qui suivit cette découverte, si l’on revient quelques années plus tard sur les champs d’or qui furent le théâtre de tant de désordres, on sera surpris des progrès qui y ont été réalisés ; on admirera les allures régulières d’une industrie si nouvelle et si riche encore après treize années d’exploitation. Habitués que nous sommes à entendre citer les champs d’or comme des lieux de débauches et de fortunes imprévues, ce sera un spectacle consolant que de constater l’ordre qui y règne, de compter les œuvres de longue haleine qui y sont entreprises, et de voir que l’industrie y est devenue aussi stable, aussi sûre et prévoyante que dans les districts manufacturiers de l’Europe.


III

En parcourant l’une après l’autre les diverses régions aurifères de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande, on assiste aux transformations successives de l’industrie minière. Sur les champs d’or exploités depuis peu de temps, par exemple dans la province d’Otago et en certains cantons du continent qui ont été récemment explorés, c’est le travail individuel qui domine. Dès que les journaux annoncent que l’or vient de se révéler dans un pays où on ne l’avait pas encore aperçu, une foule d’ouvriers abandonnent leurs occupations et se mettent en route par troupes de deux, trois ou quatre, l’un portant les outils, les autres chargés de vivres et d’approvisionnemens. Arrivés au but de leur voyage, ils se choisissent un claim, dressent leur tente et fouillent le sol jusqu’à ce que le terrain soit épuisé, ou que de nouveaux indices les décident à partir pour une autre contrée. Ces mineurs indépendans voient avec jalousie l’invasion des