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et derrière laquelle on croit apercevoir la rareté et le l’enchérissement des subsistances. L’augmentation du rendement de la terre est une conséquence certaine du progrès industriel qui s’est manifesté avec un nouvel éclat à l’exposition de 1862.

C’est à la fabrication des machines qu’appartient sans contredit le rôle le plus important dans la révolution qui a transformé presque toutes les branches d’industrie. Déjà la génération qui nous a précédés s’extasiait devant les forces nouvelles que la science, maîtresse de la vapeur, ajoutait au travail de l’homme. Ces forces bientôt n’ont plus suffi. Que sont devenues les premières locomotives qui ont couru sur les voies ferrées, et les premières machines qui ont mis en mouvement les steamers ? Elles ne seraient plus bonnes aujourd’hui qu’à figurer dans les musées. Ces merveilleux engins mécaniques ont acquis promptement des proportions et une puissance que les imaginations les plus ardentes n’auraient point osé concevoir, et ils n’ont pas dit leur dernier mot. La science, aidée à son tour par la pratique industrielle, tend à simplifier les rouages et à employer des métaux plus résistans. Le fer cédé la place à l’acier ; l’acier lui-même trouve dans les découvertes dues à M. Bessemer des qualités et des applications que l’on ne soupçonnait pas. La préparation plus habile, plus variée, plus abondante des métaux a influé nécessairement sur la construction des machines, et celles-ci se sont multipliées, non-seulement au profit des grandes manufactures, mais encore au profit d’industries qui étaient demeurées dans un ordre secondaire, ou qui paraissaient, à jamais réservées au travail manuel. Nous ne saurions énumérer ici tous les appareils nouveaux ou perfectionnés qui sont décrits dans les rapports du jury, Bornons-nous à constater, d’après les autorités les plus compétentes, que, dans ce prodigieux développement du génie mécanique auquel tous les peuples ont participé, la France se maintient aux premiers rangs. Cette appréciation est confirmée par les statistiques de la douane, où l’exportation des machines et mécaniques figure pour une valeur considérable, qui va s’accroissant chaque année. Sauf de rares exceptions qui s’appliquent à des articles spéciaux, les machines françaises ne le cèdent en rien, pour l’habileté de la fabrication, aux machines anglaises. Quelques machines françaises seraient même d’un emploi plus économique, parce qu’elles ont été établies de manière à consommer moins de combustible. La cherté de la houille en France a tout d’abord dirigé vers ce but les combinaisons des inventeurs et des constructeurs. Les fabricans anglais, qui n’avaient point à se préoccuper au même degré de cette question, commencent à en tenir compte, et depuis quelques années ils ont fait sous ce rapport de grands progrès.