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la Sologne et Romainville, malheureusement plus loin de Romainville que de la Sologne. Après l’atmosphère de différens pays, on en vint à analyser celle qui avait séjourné ou passé auprès des macérations peuplées d’infusoires. Un sirop en pleine fermentation et rempli de levure laissait échapper des spores de ce végétal que l’air entraînait avec lui dans ses mouvemens, et en lavant un courant d’air qui avait circulé au-dessus d’une macération de viande corrompue, on recueillit et on fît éclore dans l’eau des germes qui, reproduisaient tous les infusoires vivant dans la macération.

À ces exemples remarquables j’ajouterai encore l’observation suivante, la plus curieuse de toutes. Une affreuse maladie qui s’attaque au cuir chevelu, le favus, la teigne, puisqu’il faut l’appeler par son nom, est produite par un champignon microscopique, l’achorion shœnleinii. Elle a été étudiée avec soin par M. Bazin, médecin de l’hôpital Saint-Louis, qui admettait depuis longtemps la possibilité de sa transmission par l’air, et qui se joignit à M. Lemaire pour le démontrer. On fit venir un jeune malade de seize ans qui n’avait jamais été soigné et qui était entièrement envahi ; on le plaça dans un courant d’air, on mit à quelque distance un vase refroidissant, et on recueillit l’eau de condensation : elle était pleine de spores vivans d’achorion entraînés par l’air.

Il est bien difficile de se soustraire aux conclusions qui découlent d’observations aussi nettes, surtout quand on les rapproche de quelques autres expériences que l’on doit encore à M. Pasteur, et dont il me reste à parler. M. Pasteur prépare un grand nombre de ballons dont les cols étirés à la lampe en un long tube étroit sont plusieurs fois recourbés sur eux-mêmes, et se terminent enfin par une fine ouverture. Il y introduit soit de l’eau sucrée albumineuse, soit de l’urine, soit du fait qu’il fait bouillir pendant quelques minutes, et il abandonne les ballons dans un lieu tranquille sans les fermer. L’ébullition a détruit tous les germes humectés qui existaient dans les liquides ; l’air qui rentre au premier moment n’en contient pas de vivans parce qu’il est chaud, et celui qui viendra ensuite, à cause de la lenteur de ses mouvemens, déposera dans les sinuosités du col les poussières flottantes, qui n’arriveront que difficilement jusqu’au liquide ; mais cet air se renouvellera constamment à cause des variations de température et de pression, et la solution se trouvera bientôt en contact avec de l’air atmosphérique auquel on n’aura fait subir aucune autre préparation que de le dépouiller de ses poussières. Suivant l’hétérogénie, tous les ballons devront être féconds ; suivant la panspermie, un grand nombre resteront stériles : l’expérience donne raison à la panspermie.

J’arrive enfin à une dernière épreuve, la plus simple de toutes, et celle qui répond le mieux aux objections de l’hétérogénie, M. Pasteur