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été traversée par la guerre de Crimée, par l’insurrection de l’Inde, et qui a eu à faire face aux grandes dépenses des fortifications. Non-seulement, on le sait, cette augmentation de dépenses n’a donné lieu à aucune charge nouvelle, à aucune augmentation de taxe, mais elle a coïncidé avec l’allégement le plus considérable qu’ait jamais pu espérer aucun peuple. En France, nous sommes partis en 1852 d’un budget de 1,442 millions pour arriver en 1863 à un budget qui atteindra 2 milliards 300 millions, avec une augmentation de 850 millions. On comprend que des résultats si différens aient été de nature à frapper les esprits, et évidemment les Anglais avaient l’œil sur notre situation financière lorsqu’ils accueillaient avec tant d’enthousiasme le dernier budget de M. Gladstone : ils faisaient une comparaison qui n’était pas à notre avantage.

Il y a encore dans le dernier exposé financier de M. Gladstone un point qui fournit une comparaison des plus défavorables pour nous. En 1815, après leur grande lutte contre l’empire, les Anglais avaient une dette publique de 861 millions de liv, sterl., en francs de 21 milliards 525 millions, absorbant en intérêts 31,646,000 liv. sterl., en francs 791 millions. De 1815 à 1853, à la veille de la guerre de Crimée, cette dette a été réduite en capital de 92 millions de livres sterling ou de 2 milliards 300 millions, et en intérêts de 5 millions 1/2 de livres sterling. Les besoins de la guerre de Crimée l’ont fait remonter un moment à 805 millions en 1856 ; mais elle a été réduite depuis de 16 millions 1/2 de livres sterling, grâce toujours à des excédans de recettes, ce qui est le seul véritable amortissement. Chez nous, en 1814, la dette active appartenant à des tiers, déduction faite de celle qui appartient à l’amortissement, était en intérêts de 63 millions, et en capital de 1 milliard 300 millions ; elle est aujourd’hui en intérêts de 340 millions[1], et en capital nominal de plus de 11 milliards. Si nous y ajoutons, comme cela est juste, les rentes qui appartiennent à l’amortissement et les intérêts de la dette flottante, nous arrivons à un chiffre d’arrérages de 582 millions, représentant un capital de plus de 14 milliards, et dans ce chiffre ne sont pas comprises les diverses dotations, qui figurent au budget de 1865 pour 45 millions 1/2, et qui constituent bien encore une des charges de la dette publique, puisqu’elles sont permanentes, et que c’est toujours à la bourse des contribuables qu’il faut s’adresser pour les payer. Enfin l’ensemble de ce qui figure au chapitre dette publique et dotations s’élève en France au budget de 1865 à 698,623,719 francs. En Angleterre, les charges correspondantes se sont élevées en 1863 à 702,891,450 francs.

Nous voilà donc, avec un point de départ si différent en 1815,

  1. Rapport de M. O’Quin sur le budget de 1865.