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siège de Césarée, de telle sorte qu’il tenait entre ses mains les deux grands évêchés de la Palestine. On l’accusait encore de faire argent des biens de son église. Il avait vendu à son profit, disait-on, un voile broché d’or destiné à couvrir les catéchumènes pendant le baptême par immersion, voile qui provenait des libéralités du grand Constantin. D’acheteur en acheteur, le vêtement sacré était devenu la propriété d’un pantomime, qui s’en servait dans ses représentations grotesques : tels étaient les dires des ennemis de Cyrille, accueillis trop facilement en Occident.

Enfin le siège d’Alexandrie était le sujet de la quatrième réclamation, Pierre, l’ami des Occidentaux, étant mort à Rome, son frère Timothée s’était présenté au suffrage des Alexandrins pour le remplacer : il avait été élu ; mais son concurrent avait également réussi dans une contre-élection. Laquelle des deux serait ratifiée par les évêques orientaux ? A qui allait appartenir le premier siège de l’Égypte ? Les Occidentaux demandaient que ce fût à Timothée, leur ami et le frère d’un homme qui avait été en communion constante avec eux, et ils désiraient que pour cette raison les difficultés électorales fussent discutées et jugées à Rome.

Ainsi donc la prétention de l’église romaine n’allait pas à moins qu’à régler le sort des quatre grands sièges métropolitains de l’Orient, Constantinople, Antioche, Jérusalem, Alexandrie, et elle citait ces églises à son tribunal comme ses justiciables. Comprenant ce qu’une telle prétention pouvait avoir de blessant pour ceux qui en étaient l’objet, les évêques d’Italie cherchaient à l’adoucir dans la forme. « Ce qu’ils réclamaient, disaient-ils avec une feinte modestie, ce n’était pas la prérogative du jugement, mais une simple part à des décisions qui intéressaient la chrétienté tout entière. » Ces questions de discipline n’étaient pas les seules que les évêques indiquaient dans leur lettre comme une sorte de programme du concile ; ils en ajoutaient d’autres qui touchaient au dogme, par exemple celle de l’hérésie des apollinaristes ; pourtant il n’échappait à personne que ce n’était pas l’examen de ces dernières qui avait motivé la convocation d’un concile œcuménique à Rome.

Cette lettre n’eut point, il s’en fallait bien, l’approbation de Théodose ; mais il n’y répondit que plus tard, et pour le moment, loin d’empêcher la réunion d’un concile à Constantinople, il la hâta de tout son pouvoir, Dès le mois de juin 382, l’assemblée put commencer ses délibérations : presque tout l’Orient s’y trouvait représenté. Cependant Grégoire de Nazianze, retiré en Cappadoce, dans sa terre d’Arianze, dont il avait fait une solitude monastique, manquait à l’appel, et la gloire attachée à son nom, ainsi que la célébrité de ses dernières luttes, rendait plus visible une absence qu’on pouvait