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ait fait dès 1853 un sérieux effort pour liquider équitablement une portion des créances en souffrance ; il ne put malheureusement mener son œuvre à fin. M. Barzanallana a eu déjà le portefeuille des finances et a conduit de grandes opérations : on ne doute point qu’il ne remédie activement aux difficultés que son prédécesseur lui a léguées, et, s’il doit faire appel au crédit, qu’il ne rencontre un bon accueil sur les places de Paris et de Londres. Le général Narvaez n’a pas hésité à lever l’espèce d’exil dont le ministère précédent avait frappé le général Prim. On assure qu’il n’est pas impossible que ce cabinet ne finisse par reconnaître l’Italie, ce qui nous paraîtrait raisonnable et habile ; mais ce qui comblerait surtout de joie les panlatinistes, heureux enfin de voir réunis en un seul faisceau les trois peuples latins.

Nous n’avions point tort lorsque nous constations, en dépit des préventions que la cause des confédérés inspire à une trop grande partie de la presse européenne, que les avantages de la guerre en Amérique étaient notoirement pour le nord. Nous ne nous trompions point non plus lorsque, malgré le bruit qu’on faisait de la candidature du général Mac-Clellan, nous ne voulions point désespérer du succès des républicains dans l’élection présidentielle. L’opinion publique dans les états du nord est sortie enfin du découragement où les incertitudes de la guerre l’avaient plongée durant l’été. Les succès de Sherman et de Farragut, la position dominante occupée par Grant sur les voies de terre et d’eau qui conduisent à Petersburg et à Richmond, ont montré clairement de quel côté sont l’ascendant des armes et la certitude du triomphe final. Il n’en fallait pas tant pour rendre son élasticité au mobile esprit public américain. Le manifeste par lequel Mac-Clellan a répondu à la candidature qui lui était offerte par la convention de Chicago a achevé de rendre la confiance aux républicains en jetant la division au sein des démocrates. Le général Mac-Clellan, en exprimant sa pensée sur le maintien de l’Union, a fait preuve d’une honnêteté de caractère qui a déjoué la tactique ambiguë de son propre parti. Mac-Clellan a dit franchement qu’il voulait l’Union avant tout, l’Union rétablie par les moyens pacifiques, s’il suffisait, pour y ramener les confédérés, de leur laisser leurs states rights et de ne point intervenir entre eux et leurs esclaves, mais l’Union à tout risque et à tout prix, si ces concessions ne suffisaient point aux confédérés. Mac-Clellan a fait passer ainsi au-dessus des calculs de l’ambition la fidélité patriotique et le sentiment d’honneur militaire qui le lient à la cause pour laquelle il a combattu et aux armées qu’il a commandées. Cette franchise a indigné les copper-heads, qui veulent, eux, la paix à tout prix, la paix même sans le rétablissement de l’Union, et qui comptent, avec le concours des esclavagistes, reprendre la prépondérance que le parti démocrate a si longtemps possédée dans la république. En même temps que les copper-heads s’éloignent ainsi de Mac-Clellan, les war-democrats n’ont point résisté à l’heureuse influence qu’ont exercée sur l’esprit public les succès des armes fédérales. M. Seward, le secrétaire d’état et l’orateur éloquent du gouvernement de M. Lincoln, a montré avec